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L’univers d’Alan Moore à Charleroi

Alan Moore est sans conteste un scénariste hors pair. Il officie, avec un succès grandissant, depuis une bonne vingtaine d’années dans le monde de la bande dessinée.
Auteur anglais, seule une partie de ses œuvres sont disponibles en français. Mais, de grands romans graphiques comme Les Gardiens (Watchmen), From Hell ou La Ligue des Gentlemen Extraordinaires en ont fait la popularité en francophonie.

Avec « Alan Moore, les dessins du magicien », c’est à travers une exploration de plus de 200 œuvres originales que les organisateurs de l’exposition convient le public à pénétrer dans l’univers de ce créateur.

Inspiré par l’arbre séfirotique de la Cabale, le parcours de l’exposition s’articule autour de dix points qui se penchent chacun sur une thématique puisée dans sa vie ou dans ses récits. Ces dix points sont reliés entre eux par un réseau de lignes jaunes tracées sur le sol. Ça et là, des boules à miroirs et des bidons métalliques apportent au visiteur quelques traits de lumières dans une pénombre emplie de mystère…

1 – Un gentleman extraordinaire

Dès son entrée, le visiteur est accueilli par un portrait d’Alan Moore, réalisé par le photographe Jose Villarrubia. Il surplombe un clavier d’ordinateur un peu étrange, puisque ce dernier est doté d’une bougie. Il est à l’image de ceux que l’auteur utilise couramment. Il faut dire que Moore fait une grande consommation de cet accessoire informatique. En général, sa frappe frénétique sur les touches lorsqu’il écrit ses scénarios impose d’en changer tous les deux mois environ…
Ce premier espace est dédié à l’auteur et ses œuvres de jeunesse. On y découvre plusieurs planches dessinées par lui-même durant les années 70. En effet, à l’instar de Greg et Goscinny, Alan Moore a débuté sa carrière en tant que dessinateur. Ceci explique, sans doute, une partie de sa maîtrise du rythme et du découpage de ses histoires. Jugeant qu’il dessine trop lentement, il se consacre entièrement à la production de scénarios dès le début des années 80.
Toujours dans la même section, un mur entier présente sa vie sous forme d’une bande dessinée en couleur. Cette histoire a été publiée dans le mensuel Bang !.

Superpouvoirs

2 – Les mystères du quotidien

Cette section met en avant les récits où Moore montre une réalité quotidienne, presque banale, en y mêlant une atmosphère mystérieuse. Des planches, extraites de A Small Killing (Petits Meurtres), dues au talent de l’argentin Oscar Zarate, nous emmènent dans cet univers nous plongeant dans le quotidien de l’Angleterre contemporaine. Un autre récit contemporain (It’s dark in London, des. : O.Zarate) met en scène des personnages dans le pub où Jack L’Eventreur choisissait ses victimes. Enfin, quelques pages extraites de Brought to Light : Shadowplay, réalisées par Bill Sienkiewicz, nous content les confessions d’un agent de la C.I.A. au bar d’un pub.

3 – Superpouvoirs

Bercé par les Comics américains durant son adolescence, l’auteur anglais a créé plusieurs super héros. Plusieurs bandes nous présentent des personnages comme Marvelman (rebaptisé Miracleman pour le marché US), Captain Britain (où le ton est largement satirique) et le célèbre Watchmen (issu du crayon de Dave Gibbons). On peut également découvrir un Superman peu connu dessiné par Gibbons.

4 – Les énergies du passé

S’inspirant des héros romanesques du 19e siècle, Moore crée The League of Extraordinary Gentlemen avec le dessinateur Kevin O’Neill. L’idée est de rassembler dans des aventures communes cinq singuliers personnages : Allan Quatermain, l’aventurier des Mines du Roi Salomon de H. Rider Haggard, le Capitaine Nemo de Jules Vernes, l’Homme Invisible de H.G. Wells, Mina Harker, un personnage féminin du Dracula de Bram Stoker et le Docteur Jekyll et Mister Hide de Robert-Louis Stevenson. Ce sont de fort intéressant crayonnés de planches de cette série qui sont exposés, aux côtés d’un hommage à The Spirit de Will Eisner, de planches de Cobweb-Grooveweb (par Melinda Gebbie), First American (par Jim Baikie) et Tom Strong (par Chris Sprouse).

L’adaptation cinématographique grand-guignolesque de La Ligue des Gentlemen Extraordinaires ne reflète pas du tout l’esprit de la série originelle. Notamment au niveau de l’interprétation de Sean Connery dans le rôle d’Allan Quatermain. Le personnage imaginé par Moore tient plus du vieillard bedonnant que du héros surpuissant qui est porté à l’écran. Mais pouvait-on imaginer que l’ex-James Bond accepte un rôle de héros sur le retour ? Il est peu probable que l’on assiste à une nouvelle adaptation d’un récit de la Ligue au cinéma, d’une part parce que les créateurs n’y sont pas favorables et d’autre part parce que ce qui pourrait être adapté ne cadre pas avec les objectifs d’une superproduction. Il est, en effet, difficilement imaginable qu’une histoire où Mina Harker est violée par l’Homme Invisible, qui est tué par Mister Hide en représailles, voit le jour au cinéma… Ouf !

5 – Les leçons de l’Histoire

Avec ses 500 pages, From Hell est sans conteste l’œuvre majeure de Moore. Il a mis plus de dix ans à développer ce récit, couronné en 2001 par le Prix de la Critique au Festival d’Angoulême. Ce sont les 24 pages et la couverture de l’Appendix II : The Dance of the Gull Catchers qui sont présentées dans cette cinquième section. Quelques pages du scénario accompagnent les planches de Kevin O’Neill.

6 – Les chocs du futur

La science-fiction est un thème qu’affectionne particulièrement le scénariste anglais. Il a développé, pour le magazine 2000 A.D., une multitude d’aventures allant de la réflexion philosophique à l’humour déjanté. L’expo nous permet d’en visualiser quelques extraits avec des planches issues de Skizz (un sous-E.T. dessiné par Jim Bakie), Warpsmith (par Gary Leach), D.R. & Quinch (par Alan Davis), Halo Jones (une héroïne soldat de l’espace, illustrée par Gibson)…

7 – Jeux de pouvoirs

Cette partie est entièrement dédiée à V for Vendetta, une série dessinée par David Lloyd, où Moore exprime une réflexion politique basée sur une analyse des forces et des personnalités qui tiennent en place dans une société totalitaire.

 

8 – La puissance de l’imagination

« L’imagination est une composante fondamentale de la réalité et ne peut pas vraiment être étudiée comme une entité séparée. »
(propos d’Alan Moore, dans Cerebus n°217-220, Avril-Juillet 1997)

C’est le thème de l’horreur qui est au centre de cette section. On y découvre notamment Nighttar, un récit d’horreur contemporain mettant en scène une jeune sorcière (dessin : Bryan Talbot).

David Lloyd
David Lloyd
The Mirror of Love

9 – La puissance de l’amour

Il n’y a pas de genre interdit pour Moore, et il n’hésite pas à aborder le thème de la pornographie (avec Lost Girls, dessiné par sa compagne Melinda Gebbie) ou l’homosexualité (avec The Mirror of Love).

Lost Girls met en scène trois femmes issues de la littérature populaire : Dorothy du Magicien d’Oz, Wendy de Peter Pan et Alice d’Alice au Pays des Merveilles. Ces petites filles devenues femmes se rencontrent, par hasard, dans un hôtel autrichien, en 1913. Pour cette série, Melinda Gebbie travaille son trait et ses couleurs avec beaucoup de sensibilité et de finesse. Plusieurs très belles esquisses réalisées à l’aide de crayons de couleur sont exposées.

Pour illustrer The Mirror of Love, ce sont des images mêlant imagerie digitale et photographie, réalisés par José Villarrubia, qui sont présentées.

10 – Living magic

La route se termine avec cette dernière section consacrée essentiellement à sa série Promethea. Sorte de guide à la magie, elle mélange magie, ésotérisme et rites initiatiques. Les planches de J.K. Williams côtoient d’étonnants montages (digital/photos) de José Villarrubia.

 

Au terme de ce parcours dans l’œuvre d’Alan Moore, on ne peut que s’émerveiller de sa diversité et de sa richesse. Cela peut paraître paradoxal pour un homme qui ne quitte quasi jamais sa ville de Northampton au centre de l’Angleterre… Quelle imagination !

Promethea
Exposition « Alan Moore, les dessins du magicien »

Du 14 février au 4 avril 2004
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h,
fermé les lundis et jours fériés.

Palais de Beaux-Arts de Charleroi
Place du Manège
B-6000 Charleroi

Info : +32 (0)71 86 22 74 - Courriel : charleroimaginaire@charleroi.be

Web
: www.alan-moore-charleroi.com
Arbre séfirotique de la Cabale

Photos © Marc Carlot, Auracan.com 2004

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18/2/2004 - source: auracan.com
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