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Entretien avec Jérôme Félix et Paul Gastine

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Jérôme Félix et Paul Gastine © Manuel F. Picaud / Auracan.com
« Le mythe de Rennes-le-Château passionne beaucoup de gens parce qu’il fait penser à Tintin... »

Jérôme Félix signe avec Paul Gastine au dessin et Scarlett aux couleurs le premier volet d’une nouvelle série d’aventures dans un contexte ésotérique.
L’Héritage du Diable est une saga fraiche et dynamique qui ne cache pas sa filiation à Indiana Jones. C’est le premier album du jeune dessinateur Paul Gastine, 23 ans.

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© Gastine - Félix / Bamboo
Jérôme Félix, l’auteur de l’Arche avec Vincent Mallié et d’Un pas vers les étoiles avec Joël Parnotte, et l’éditeur Bamboo ont misé sur le talent de ce jeune prodige. Rencontre à Paris pour mieux comprendre la genèse de cette série et connaître leurs projets.

Votre rencontre remonte à sept ans déjà…
Paul Gastine : J’ai rencontré Jérôme alors qu’il animait un atelier de BD dans une MJC. Je n’avais jamais fait de BD sinon des BD que je faisais en cours sur mes profs au lieu de travailler consciencieusement ! Il m’a enseigné les techniques de base de la bande dessinée.
Jérôme Félix : J’anime en effet un atelier BD pour ados dans un centre culturel où je suis salarié à mi-temps. Paul s’y est inscrit à 15 ans. J’ai tout de suite vu qu’il était au dessus du lot et surtout qu’il avait une capacité de progresser très vite. Après lui avoir enseigné ce que je savais, je lui ai proposé de rencontrer des dessinateurs professionnels qui pourraient l’aider et que je connais bien : Vincent Mallié, Marc Bourgne, Lidvine et Joël Parnotte. Ils étaient étonnés du niveau du dessin de Paul par rapport à son âge. Il a donc pu profiter de tous leurs conseils et continuer à progresser. À 18 ans, Paul était publiable. Mais je l’ai prévenu des difficultés du métier et incité à faire des études. Il est donc allé à la fac.

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l'Héritage du Diable T1
extrait de la planche 16
© Gastine - Félix / Bamboo
Mais Paul a voulu poursuivre dans la voie de la BD…
JF: Après trois ans, Paul est revenu avec l’idée de faire de la BD. Ses parents l’ont accompagné dans cette démarche. Et cela s’est enchainé très vite. Quand Paul a envoyé son dossier, son dessin étant d’un tel niveau, qu’en deux jours, il a eu une réponse positive. Dès qu’il l’avait vu, Olivier Sulpice [patron de Bamboo, ndlr] avait été enthousiaste et m’avait demandé de le faire grandir. J’ai donc dit à Paul de faire ses études fort de cette promesse et j’ai conseillé à Paul de signer avec Bamboo. Le contrat a été signé en 2005.

Qu’avez-vous appris auprès de vos mentors ?
PG : Vincent Mallié m’a beaucoup appris à ne pas rester sur mes acquis à toujours pousser le cadrage, d’avoir un peu d’audace, de travailler l’art de la composition. Joël Parnotte m’a plus appris l’élégance du trait, de son dessin. Et puis j’ai eu la chance de pouvoir voir leurs planches originales.
JF : Joël comme Vincent lui ont appris à être un auteur de bande dessinée fiable et responsable. Ils lui ont parlé de la solitude du travail. En gros, il a toutes les cartes pour réussir dans ce métier, mais maintenant, il doit être professionnel, ne pas s’éparpiller. Comme Paul aime bien leur travail, il a d’autant mieux écouté leurs conseils.

PG : J’étais entouré de pros que j’admirais. Cela remettait de temps en temps les pendules à l’heure et cela me motivait. Le métier de dessinateur est un peu un métier d’ours. Ce n’est pas toujours évident de s’enfermer pour dessiner.
JF: Un exemple de conseil de Vincent : « Fais toi des horaires de bureau. Comme ça, tu as ton travail et ta vie à côté. » Techniquement, Marc Bourgne a aussi insisté sur l’idée qu’un dessin de bande dessinée n’est pas un beau dessin mais un dessin au service d’une histoire. Quand on démarre, on veut montrer au monde entier qu’on sait bien dessiner et parfois c’est au détriment de l’histoire. Marc, Joël et Vincent lui ont appris à être sobre dans les cadrages, l’importance du jeu d’acteurs. Ses mentors lui ont permis d’avancer plus vite. Cela dit, sans l’aide de nous tous, Paul avait le talent pour s’en sortir tout seul.
PG : Ils m’ont peut-être permis d’aller plus vite et surtout d’aller à l’essentiel.

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l'Héritage du Diable T2, crayonné inédit © Gastine - Félix / Bamboo

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l'Héritage du Diable T1
extrait de la planche 28
© Gastine - Félix / Bamboo
Comment avez-vous élaboré cette histoire ?
JF : L’idée était vraiment que Paul fasse un album d’un bon niveau et qu’il puisse capitaliser sur ce qu’il sait faire. Paul m’a donc donné son cahier des charges, ce que je ne fais jamais avec mes dessinateurs. En tant que scénariste, je ne suis pas là uniquement pour relier les envies graphiques des dessinateurs. Mais là, je me suis dit qu’il fallait le faire. Paul m’a donné un cahier des charges qui le sécurisait : l’ésotérisme, une héroïne bagarreuse, la grande aventure... En tant que scénariste, je voyais bien le danger de tout cela, ce n’était pas loin des poncifs. Mon travail a été de donner du liant et de l’humanité au récit.
PG : Au niveau du dessin, j’avais en tête de dessiner sur les années 1930. J’avais envie d’un personnage qui tenait un bon vieux parchemin. Au niveau de l’histoire, je souhaitais faire quelque chose d’un peu ésotérique. Jérôme m’a montré une cassette d’un documentaire sur les secrets des Templiers.
JF : Paul avait lu et aimé Da Vinci Code. Je lui ai parlé de l’histoire de Rennes-le-Château. Je lui ai passé la cassette. Si cela allait dans son univers, on pourrait en faire quelque chose.
PG : On est parti là-dessus. L’histoire de ce curé qui avait entrepris des travaux gigantesques à l’échelle de son village à l’aide d’argent obscur et inexpliqué – pouvant donc venir du Trésor des Templiers – me branchait bien.
JF : Je sentais depuis un certain temps que le mystère de Rennes-le-Château recelait un bon potentiel. Au départ, je voulais vraiment écrire une histoire assez érudite. Mais voyant le dessin de Paul et son esprit d’aventure, et conseillé en cela aussi par l’éditeur, j’ai élaboré une histoire à la Indiana Jones. J’ai lu énormément de bouquins sur ce mythe. Mais c’était aussi au moment où se créait la collection Loge noire. Et plus il y avait d’albums et de livres ésotériques, plus je me disais qu’on allait arriver en fin de course. Plus cela me confortait d’aller moins vers la grande érudition et plus vers la grande aventure. Le mythe de Rennes-le-Château passionne beaucoup de gens parce qu’il fait penser à Tintin : il y a des parchemins codés, des passages secrets, des hommes mystérieux qui en suivent d’autres, des morts tragiques…

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l'Héritage du Diable T2, extrait inédit de la planche 4 © Gastine - Félix / Bamboo

De fait, vous transposez l’histoire de la fin du 19e siècle à la veille de la Seconde Guerre mondiale.
JF : Il y avait deux raisons à cela ; d’une part, pour être dans l’atmosphère Indiana Jones ; d’autre part, pour signifier aux connaisseurs du mythe qu’on est dans la fiction et je ne voulais surtout pas proposer une solution au mystère donnée par des gens qui ont écrit des livres sur Rennes-le-Château. Le Da Vinci Code, par exemple, serait un plagiat de l’Énigme sacrée [de Michael Baigent, Richard Leigh et Henry Lincoln, ndlr], l’une des théories. Comme un enfant, je voulais inventer la résolution du mystère qui ne sera d’ailleurs pas forcément ésotérique… On s’est donc plongé dans une histoire nourrie par le mythe du mystère de Rennes-le-Château. On l’a transposée à une autre époque pour faire plaisir à Paul, et aussi pour dire aux lecteurs que c’est bien une fiction. L’album est d’ailleurs précédé d’un avant-propos écrit par le responsable du site sur Rennes-le-Château qui raconte le vrai mystère. Ce ne sera pas une énième relecture d’une histoire rabâchée.

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l'Héritage du Diable T2, extrait inédit de la planche 4 © Gastine - Félix / Bamboo

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l'Héritage du Diable T1, crayonné inédit
© Gastine - Félix / Bamboo
Ainsi, par exemple, vous vous limitez à une seule interprétation de la phrase « Et in Arcadia ego » qui figure sur le tombeau du tableau les Bergers d’Arcadie de Nicolas Poussin.
JF : Le problème de la bande dessinée ésotérique est qu’elle nécessite beaucoup d’explications, d’énormes pavés de textes si on veut rentrer dans les détails. Or la BD n’est pas un medium qui laisse une grande place au texte. Ou alors, on se retrouve avec des longs récitatifs à la Blake et Mortimer. Là, on est dans un format très court de 46 pages. Automatiquement, il faut utiliser des raccourcis narratifs. Sur ce tableau de Poussin, il existe des bouquins de 500 pages et plein de théories. J’ai pris la plus simple. En gros : le peintre a voulu indiquer que le tombeau était à côté de Rennes-le-Château. Pour la mention sur le tombeau, j’ai retenu la phrase qui correspondait le plus à mes attentes scénaristiques, à savoir : « Moi aussi je suis en Arcadie ». La question étant : qui est « moi aussi » ?

Le tableau est d’ailleurs d’une part incrusté dans l’album, d’autre part dessiné par Paul…
PG : J’ai redessiné le tableau car le héros trouve une copie. Comme dans l’histoire, le tableau original est mis en vente, c’eut été ridicule de reprendre mon dessin.
JF : Scarlett, notre coloriste, a fait un travail remarquable. Une des grandes chances qu’a eu Paul sur cet album est que nous voulions Scarlett. L’éditeur s’en est donné les moyens. Si l’incrustation est bien faite, c’est qu’elle l’a colorié de manière impeccable. On était comme des gamins quand on a su qu’elle disait oui !
PG : Elle correspond bien au style qu’on voulait faire à la fois très dynamique et avec cette ambiance un peu rétro.

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l'Héritage du Diable T2
extrait inédit de la planche 8
© Gastine - Félix / Bamboo
Avez-vous écrit la totalité de l’histoire ?
JF : Je procède comme d’habitude. D’un côté, quel est le secret de l’histoire ? De l’autre, que vont devenir les personnages à la fin de l’histoire ? Là, l’histoire contient aussi une triangulaire amoureuse. Je sais évidemment ce qu’il y a comme secret : pourquoi notre héros retrouve-t-il son amoureuse peinte sur le tableau de Poussin peint 200 ans avant ? J’ai monté tout un organigramme. Par contre, je ne sais pas avec qui le héros finira. Ce n’est pas la peine d’écrire trop précisément à l’avance car cela donne au récit quelque chose d’artificiel. Souvent les scénaristes disent que les personnages deviennent vivants. Je pense qu’il y a des choses qu’on leur fait faire qui les empêchent ensuite de faire certaines choses après.

Les trois premières planches de l’album sont assez atypiques par rapport à la suite de l’album.
JF : C’est un avant-propos. J’utilise souvent ce procédé pour situer rapidement le contexte de l’histoire – là un récit d’aventures ésotériques – et pour créer une scène spectaculaire d’entrée. Si je commence avec une scène spectaculaire avec le héros, comme l’album monte crescendo, on arrive rapidement à saturation. Ces trois premières pages d’avant-propos ont évidemment leur importance dans la suite de l’histoire et des conséquences dans le T2. Un peu comme dans le Triangle Secret de Didier Convard, on va remonter le temps à partir de cette « évocation du Diable ».

D’ailleurs en termes graphiques, c’est aussi plus proche d’un style Soleil...
PG : En fait, ce sont parmi les dernières planches que j’ai dessinées. On voulait une scène accrocheuse. On a laissé mon dessin le temps de s’affirmer avant de m’y lancer.

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l'Héritage du Diable T2
extrait inédit de la planche 8
© Gastine - Félix / Bamboo
JF : Dans les albums suivants, la partie moyenâgeuse va prendre plus de place. On va avoir une dizaine de pages dans le T2. Les choses ne vont pas être ce que l’on croit. Il y a un personnage qui a un bras coupé qui va prendre de l’importance par exemple.
PG : Nous sommes davantage partis sur le Diable que sur l’histoire de Marie-Madeleine...
JF : Vous aurez des surprises. Comme dit Hitchcock : « Il faut bien que le personnage court après quelque chose » ! Dans cette série, les méchants courent après les pouvoirs du Diable, notre héros pense trouver une piste lui permettant de retrouver son amoureuse.

Paul, c’est un peu vous le héros, non ?
JF : C’est un peu vrai !…
PG : Dans notre cahier des charges, je voulais vraiment dessiner une histoire avec une gamme de personnages différents avec un héros à la Tintin dans lequel on puisse s’intégrer.
JF : Quand j’entame une collaboration avec un dessinateur, j’essaye que l’histoire corresponde à ce qu’il est. Quand j’ai commencé à travailler sur l’Héritage du Diable, Paul était adolescent. J’ai essayé de trouver quelque chose qui lui parle. Il sortait d’une relation amoureuse avec une fille qu’il idéalisait comme tout adolescent. Partir sur un thème comme cela lui parlerait, car c’est ce qu’il vivait à ce moment-là. Il est important que le scénariste relie la fiction à ce que vit le dessinateur. Ce qui est rigolo, c’est que le dessinateur change avec du recul. Pour éviter l’écueil des poncifs, j’aime utiliser un personnage, comme dans l’Arche, qui n’est pas un héros, mais un doux rêveur un peu naïf. Et comme l’histoire est vue à travers lui et que son regard n’est pas celui d’un aventurier, cela permet des gags, une certaine légèreté et surtout de mettre un personnage dans des situations qui ne sont pas résolues comme s’il était un aventurier. Si on avait introduit un personnage genre Largo Winch, on avait l’énième grande aventure.

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Hollywood Boulevard T1
extrait inédit de la planche 17 © Liman - Félix / Bamboo
Paul, j’imagine que vous n’avez pas d’autres projets pour le moment ?…
PG : En effet, je suis à fond dans celui-ci. Je vais commencer à y réfléchir quand je serai plus avancé.

Jérôme, vous sortez deux autres albums cette année en novembre chez Bamboo…
JF : Oui, Hollywood Boulevard [titre provisoire, ndlr] avec Ingrid Liman [voir son blog] au dessin. Cela se passe dans le Hollywood mythique de 1937. Dans une firme, la vie des stars est entièrement scénarisée par des scénaristes. On scénarise des mariages, des divorces, y compris la mort, et le héros est un scénariste. Imaginez que la mort de James Dean a été écrite et qu’il coule en fait de jours heureux dans un village en touchant des royalties. Et parallèlement, on va raconter une histoire d’amour à la Frank Capra, une de mes grandes idoles. Pour moi, c’est un plaisir d’aller explorer un tel univers. C’est une histoire assez romantique en deux volumes chez Bamboo. C’est un éditeur avec qui cela se passe merveilleusement bien et qui m’a redonné confiance. Hervé Richez a fait un travail remarquable d’accompagnement sur l’Héritage du Diable. C’est un vrai directeur de production. Et ce n’est pas du fayotage !

Et une autre série toujours chez Bamboo…
JF : Mort et entêté avec Gunt [alias Guillaume Poux, ndlr ; voir son blog]. C’est une comédie policière contemporaine qui se passe aussi à Los Angeles. Le dessinateur change complètement de style par rapport à ces albums précédents. C’est une comédie déjantée dans l’esprit des frères Cohen. C’est un peu dans le même registre que l’Arche. Le héros est un animateur de télévision pour chien. Sa copine déclenche un tremblement de terre à chaque fois qu’elle a un orgasme. Un tueur est surnommé le puceau car il a un casier judiciaire vierge. Inutile de dire que l’histoire est irracontable, mais on espère qu’on va passer un bon moment ! Et ce ne sera pas dans la collection Humour de Bamboo mais bien dans Grand Angle. Ce sera une série de one-shots sur le thème de la seconde chance.

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Hollywood Boulevard T1, extrait inédit de la planche 30 © Liman - Félix / Bamboo

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Mort et entêté T1, extrait inédit de la planche 15
© Gunt - Félix / Bamboo
JF : Dans chaque histoire complète de Mort et entêté, il se passe un miracle et l’on regarde ce qu’en font les gens. Le 2e épisode se passera dans le monde du poker : Dieu a envie de jouer au poker et parle avec un joueur. Et si le dessinateur est d’accord, le 3e épisode racontera l’histoire d’une vieille dame qui a fait fortune en vendant des canevas érotiques. Il ne le sait pas encore ! [rires] C’est une comédie fraiche et légère qui ne ressemble à rien. Il y a encore là un vrai accompagnement d’auteurs : nous ne nous adaptons pas à la collection, c’est elle qui s’adapte à notre envie. C’est plaisant de travailler comme cela.

D’autres projets sinon ?
JF : Il est question d’écrire le prochain scénario d’Arno Monin qui a fait l’Envolée sauvage et l’Enfant maudit. Laurent Galandon, son scénariste attitré, n’a pas réussi à trouver une histoire qui lui convienne et donc je ferai un peu l’intérim, un intérim sympathique, en attendant qu’ils se retrouvent. J’ai une éthique dans ce métier : ne pas piquer les dessinateurs déjà pris dans une série. Comme ils ont envie de faire une pause, je veux bien faire l’intérim. L’histoire serait un récit policier dans un petit village de Normandie. Cela devrait s’appeler Martin Bonheur.

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Mort et entêté T1, extrait inédit de la planche 16 © Gunt - Félix / Bamboo

Malgré cela, vous êtes toujours animateur culturel à mi-temps ?
JF : Oui, je tiens à avoir la vraie vie à côté. Cela me permet aussi de refuser des trucs que je n’aurais pas envie de faire. Ce métier doit rester un plaisir. Et je ne veux pas rompre cet équilibre que j’ai mis un certain temps à trouver.

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Propos recueillis par Manuel F. Picaud à Paris en mars 2009
Tous droits réservés. Reproduction interdite sans autorisation préalable
Coordination rédactionnelle : Brieg F. Haslé © Manuel F. Picaud / Auracan.com
Tous nos remerciements à Anne Caisson
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Manuel F. Picaud
17/04/2009