Entretien avec Olivier Boiscommun et Etienne Willem
Drakoo sort ses griffes !
Dans la mythique cité de Kompiam cohabitent de nombreuses races intelligentes. Nuwan, un humain, est apprenti marmiton dans la demeure d'un grand magicien. Avec l'aide de la belle Lerëh, dont il est un peu amoureux, il apprend à lire. Mais ses incursions dans la bibliothèque vont le mettre aux prises avec un précieux grimoire, le Danthrakon. La magie de l'ouvrage s'insinue en lui alors que les pages blanchissent. Effrayé, Nuwan n'en parle à personne. Un terrible inquisiteur enquête sur l'effacement du grimoire, alors que Nuwan cache à tout le monde que de l'encre a remplacé son sang, ses larmes...
Tel est le pitch du Grimoire glouton, tome 1 de Danthrakon, nouvelle série de Fantasy scénarisée par Christophe Arleston et dessinée par Olivier Boiscommun. Nouvelle série mais pas que, puisque ce nouvel album constitue aussi la première publication de Drakoo, nouvelle maison d’édition d’édition dédiée à l’imaginaire née de la rencontre entre Olivier Sulpice (Président fondateur des éditions Bamboo) et Christophe Arleston. Ce dernier s'est vu confier la barre de ce nouveau vaisseau qui promet à ses lecteurs de les emmener voyager loin ailleurs et en d’autres temps. Deux autres albums verront le jour en octobre sous ce label et début 2020 nous pourrons découvrir le premier tome des Artilleuses, dessiné par Etienne Willem sur un scénario de l’écrivain Pierre Pevel. Nous avons rencontré Olivier Boiscommun et Etienne Willem à la Fête de la BD de Bruxelles. Ils nous ont parlé de leurs albums respectifs chez Drakoo.
Olivier, vous n’en êtes pas à votre premier album dans le domaine de l’imaginaire et de la fantasy, comment faire pour ne pas se répéter graphiquement, notamment par rapport au Règne (scén. Runberg – Le Lombard) ?
Olivier Boiscommun : A chaque fois j’essaye d’aborder un nouveau projet comme un nouvel univers, de lancer des personnages à qui nous devons, avec le scénariste, faire vivre une nouvelle histoire. Pour Danthrakon, il s’agit d’une nouvelle collaboration avec un super scénariste, avec un coloriste talentueux, et pour laquelle j’ai vraiment tenté d’adapter mon dessin. Dès le départ les éléments sont donc rassemblés pour une belle aventure artistique.
Le Grimoire glouton est le premier album publié sous le label Drakoo, cela a-t-il influencé votre travail ?
OB : Non, franchement je ne pense pas… Je crois que, concrètement, je l’ai réalisé assez tardivement. Plusieurs autres projets étaient en cours de réalisation pour Drakoo et nous avancions ensemble. La structure se lance avec celui-ci, les autres suivront très rapidement et voilà tout. Je n’ai pas perçu de pression par rapport à cette particularité, en tous cas. Je vais rencontrer le public pour la première fois autour de Danthrakon ici mais ce nouveau label n’implique pas, pour moi, une approche différente.
Nuwan, apprenti marmiton, échappe à pas mal de clichés associés à la fantasy…
OB : Avec Christophe, nous voulions disposer d’un héros auquel chacun allait pouvoir s’identifier. Un apprenti marmiton employé dans une grande maison n’est pas inabordable dans ce registre. Mais il va se retrouver confronté à quelque chose qui va bouleverser sa vie et son destin. Il fallait aussi que je puisse en faire un personnage évolutif, puisqu’il va évoluer beaucoup, physiquement et mentalement au cours des 3 tomes de Danthrakon, et ce sur des chemins insoupçonnés pour lui…et pour le lecteur !
Le monde de Danthrakon est foisonnant, avec, notamment les multiples races qui s’y côtoient. Comment s’organise votre travail avec Christophe par rapport à ce contexte ?
OB : On discute beaucoup, et nous mesurons que nous avons chacun nos influences et qu’il est intéressant de les confronter. Christophe disposait pour chaque race de codes bien définis, sauf pour une race s’apparentant à des rongeurs, je pense. A partir de là j’ai entamé mes recherches graphiques et au fur et à mesure de celles-ci les personnages se sont précisés. Celui-là avait un côté un peu trop nerveux, un autre pas assez… On en discute, je corrige, avec pour objectif d’obtenir les bonnes figures pour les bons personnages, mais en conservant cependant suffisamment de variantes pour chaque race afin qu’un personnage ne ressemble pas à son voisin. Plus généralement, Christophe maîtrise son histoire et son univers de manière impressionnante, mais reste ouvert aux échanges d’idées, donc ça fonctionne plutôt bien.
Les tomes 2 et 3 de Danthrakon sont déjà annoncés pour le printemps et l’automne 2020, une cadence envisagée dès le départ ?
OB : Oui, et un rythme qui s’impose de plus en plus en BD aujourd’hui. Mais le travail avance bien, comme la collaboration avec Claude Guth pour les couleurs. Les délais ne devraient pas poser de problème...
Ces 3 tomes constitueront-ils une histoire complète ou une suite est-elle envisagée ?
Etienne Willem et Olivier Boiscommun |
OB : L’histoire touchera à sa fin à l’issue du troisième album, et je crois qu’il existe du côté de Drakoo une volonté d’un format de récit bien défini. Les séries fleuves ne sont plus vraiment d’actualité. Cependant, je pense que Christophe a des idées pour d’autres histoires dans cet univers, donc tout est possible, mais attendons la fin du tome 3 !
Etienne, nous vous avons rencontré il y a peu pour La Fille de l’exposition universelle (scén. Jack Manini – Grand Angle), et ici, nouveau projet avec Les artilleuses…
Etienne Willem : Oui, il s’agit d’une nouvelle aventure, mais qui résulte sans doute d’un lent alignement de planètes. J’ai rencontré Pierre Pevel voici longtemps déjà autour de son univers du Paris des merveilles qui me plaisait beaucoup. Mais Pierre ne disposait pas alors de la totalité des droits sur ce cycle. Nous nous sommes quittés bons amis.
Il a ensuite récupéré les droits en question et nous avons été informés du projet de la création de Drakoo lors d’une édition du festival Troll et Légendes (grand Festival de toutes les Fantasy qui se déroule une fois par an à Mons (B) n.d.l.r). De plus, Christophe Arleston tenait à intégrer parmi les auteurs Drakoo des écrivains de Fantasy (les signatures Isabelle Bauthian, Gabriel Katz et Olivier Gay figurent parmi celles des albums à venir - n.d.l.r).
S’agira-t-il d’une histoire originale ou d’une adaptation de l’une de ses œuvres ?
EW : Un scénario original qui se déroulera dans cet univers qui évoque le Paris de la belle époque mais dans lequel cohabitent aussi de nombreuses créatures fantastiques. La série se nomme Les Artilleuses et met en scène trois braqueuses de haut vol qui, pour résumer, vont piquer le mauvais objet à la mauvaise personne au mauvais moment…et se retrouver aux prises avec plusieurs services secrets. L'album paraîtra en 2020.
Pour Pierre Pevel, il s’agit d’une première incursion dans la BD, comment abordez-vous cette collaboration ?
EW : C’est vrai qu’il découvre la BD, mais d’autre part il vient du jeu de rôle, il a écrit des nouvelles, des romans qui ont quelque chose de très cinématographique, de très rythmé. Du Pierre Pevel, ça se lit (presque) tout seul ! Nous avons adopté un mode de travail assez particulier, par séquences. J’y apporte certaines modifications afin de gagner en équilibre entre l’action et les dialogues, notamment, ou par rapport au découpage. On ne met pas en scène deux personnages qui se tirent dessus de la même manière qu’un affrontement à l’épée, par exemple. Je lui communique ces changements, on en discute et ça se passe très bien.
Et pour vous, être édité sous ce nouveau label, ça représente quoi ?
EW : Une très belle opportunité et la chance de collaborer avec une sorte de Dream team autour d’un univers fantastique, avec à la fois le background de Christophe Arleston et la structure de Bamboo. Sous un autre angle, c’est aussi la chance de travailler avec des éditeurs qui ont à la fois véritablement le souci de leurs auteurs et le respect des lecteurs.
Propos recueillis par Pierre Burssens le 13 septembre 2019
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Visuels © Boiscommun, Arleston / Drakoo et Willem, Pevel / Drakoo
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