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Fabien Lacaf et Nelly Moriquand © Laurent Mélikian
Fabien Lacaf et Nelly Moriquand
© D.R.

Au 19e siècle, dans un fort militaire, la nouvelle histoire de Fabien Lacaf et Nelly Moriquand nous présente l'étonnant récit d'une jeune femme qui lutte contre ses démons intérieurs.

En partenariat avec « Bandes Dessinées Magazine » dont le n°6 vient d'arriver en kiosque, rencontre avec le dessinateur.

Le bal des Chimères : dessin de couverture
Le bal des Chimères
dessin de couverture

Comment est née la nouvelle histoire que tu publies aux éditions Albin Michel avec Nelly Moriquand ?
Le Bal des Chimères est né voici quelques années comme était né celui des Pêcheurs d'étoiles. Notre coup de foudre pour la Drôme nous avait motivés, Nelly et moi, pour créer une histoire romantique et sociale autour du Rhône en 1900. De même, ma découverte de la région du Queyras et de Briançon (la ville de naissance et de jeunesse de Nelly) m'a donné envie d'y placer notre prochaine histoire commune. Comme tu peux le constater, nous mêlons depuis vingt ans vie intime et vie professionnelle, « Le Bal des Chimères » sera notre 8 e projet commun ! Bref, j'ai demandé à Nelly de travailler, voici cinq ans, sur le thème de la montagne, mais surtout de penser à une histoire de femme vue par une femme. C'est ainsi qu'est née l'histoire d'Anaïs, jeune femme fragile et cassée par un lourd secret qui revient sur les lieux de son enfance. Nelly y abordait un thème qui nous est cher à tous les deux, le secret familial, le traumatisme qui parfois nous fait prendre des chemins que nous n'avions pas prévus dans nos rêves d'enfance. Nous avons vite choisi la période 1900 qui nous a toujours attirés pour son esthétique, son côté romantique et "western" à la fois, les costumes, l'habitat, la difficulté à se déplacer et communiquer encore à l'époque rend le quotidien plein d'aventure et facilite la mise en scène.

Pourquoi avoir opté pour un diptyque ?
Nous voulions également traiter cette histoire en un ou deux albums pour lui garder sa force. Je pensais déjà à la possibilité de l'adapter pour le cinéma, car Jean-paul Rappeneau qui avait vu le projet m'avait dit tout de suite : « oh, quel beau film en dessin ! ». Le projet du Bal des Chimères est né aussi avec ma longue période de travail dans le cinéma (comme story-boarder et conseiller technique) qui m'a donné envie de faire évoluer mon style graphique en BD vers ce que je pratiquais en story-board. Faire vraiment fusionner les deux arts, créer ce que j'appellerais volontiers "un Film en BD" ! Avec Nelly, nous travaillons d'ailleurs sur le scénario et le découpage exactement comme je travaillais avec Antoine de Caunes ou Pitof : lecture minutieuse du scénario en commun, travail sur le profil psychologique et le jeu des personnages, séance d'improvisation sur les zones indéfinies du scénario pour nous étonner nous-même et trouver de nouvelles pistes de mise en scène.

Mandrin (dessin de couverture)
Mandrin (dessin de couverture)

Quelles sont les grandes lignes narratives du Bal des Chimères?
Anaïs, jolie jeune femme de vingt ans, revient sur les lieux de son enfance, la Citadelle militaire de Montdauphin, pour accompagner son époux , le capitaine Anselme de Saint-Géraud fraîchement nommé dans cette garnison dont l'ancien commandant était le père d'Anaïs. A peine arrivée, Anaïs est assaillie de troubles et d'angoisses. L'ambiance malsaine est aggravée par la jalousie maladive de son mari qui ne lui pardonne pas de renouer avec son passé et surtout un ami d'enfance, Marceau, diminué par la maladie commune des montagnes, le crétinisme et le goitre, mais toujours amoureux d'Anaïs. Anaïs est convoitée par les jeunes et fougueux officiers, mais le drame intervient rapidement : un, puis deux meurtres horribles endeuillent la garnison et jettent la suspicion autour de la jeune femme ! Elle-même doute de sa santé mentale car elle est envahie par de terribles cauchemars qui la replongent dans son enfance dominée par un père tyrannique et violent. C'est le colonel-enquêteur Laroque, vieux renard proche de la retraite, qui démêlera fil à fil, cette ténébreuse affaire faite de mystères, de sorcellerie et de manipulations.

Pour cette histoire, tu as fait évoluer ta technique : tu ne sembles plus encrer tes planches... Est-ce une facilité ou un choix graphique ? De la même façon, ce diptyque est réalisé en couleurs directes.
Pour cette histoire originale, il nous fallait un style original et j'espérais depuis longtemps faire évoluer mon style vers quelque chose de plus personnel. Nombre d'amis de la BD comme Régis Loisel ou Frank Giroud me conseillaient depuis longtemps de travailler dans le style du story-board, qui est devenu, dans le milieu du cinéma, une référence. Je travaille en croquis rapides et nerveux, au crayon gras pour garder du mouvement et de l'émotion, puis je mets rapidement en couleurs à l'aquarelle sur des tirages au format original, en copies laser noir contrastées. Cela donne un rendu encré en gardant le gras du crayonné et la sensibilité du premier jet. De plus, je me perds moins dans les détails et travaille plus, comme dans mon travail au cinéma, l'essentiel, c'est-à-dire le cadrage, le découpage et la lumière. C'est aussi une plus grande souplesse dans ma relation au scénario. Nous avons avec Nelly des séances de travail chaque semaine où nous confrontons nos points de vue sur une scène et nous choisissons le meilleur angle en recadrant les dialogues. Bref, nous story-boardons ensemble les scènes avant de les attaquer définitivement.

Peux-tu également nous parler des autres projets que tu prépares actuellement ?
Les projets ne manquent pas, car le cinéma allant bien mal en ce moment, je me suis entièrement réinvesti dans la BD. Je finis un Mandrin pour Glénat, avec Philippe Bonifay, sortie en juin 2005. J'attaque ensuite le tome 2 du « Bal des Chimères », Labyrinthes, pour Albin-Michel. Je m'attaquerai enfin au tome 2 de La Traque chez Glénat avec Daniel Bardet (le personnage principal en sera le Maréchal Vauban) et j'aurai entre-temps préparé la documentation et le co-scénario d'un projet génialissime sur le Mont St Michel au 16 e siècle, mélange d'Histoire et d'enquête religieuse, style « Da Vinci code » ! Le scénario original est signé par un nouveau plutôt prometteur : Armand Guérin, spécialiste des Bâtiments de France, un atout majeur pour ce genre de projet ! J'aurai entre-temps fini de monter mon court-métrage Monts et merveilles  (scénario Nelly Moriquand of course !) et préparé le suivant avec la même équipe. Pour ne pas perdre le rythme, j'assumerai aussi la déco du prochain Petit Festival en Herbe, début juillet à Crest dans la Drôme, dont le succès va toujours grandissant. Ce sera tout. Aujourd'hui, je dois finir la déco de la jeune troupe "Les Choeurs de l'Armée du Rouge" qui part en tournée prochainement en Rhône-Alpes !

Visitez le site de Fabien Lacaf  : http://www.fabienlacaf.com

Propos recueillis par Brieg F. Haslé en février 2005
Certains passages de cet entretien ont été initialement publiés, sous une forme partiellement différente, dans :
« Bandes Dessinées Magazine » n°6 © Brieg F. Haslé - Bandes Dessinées Magazine, 2005
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Portrait Lacaf & Moriquand © D.R.
Visuels ©
Lacaf-Moriquand / Albin Michel
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