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Fabien VEHLMANN, de son vrai nom Felipe Don Lopez
de la Vehlmann est né au Pérou en 1972. Ses
parents (tous deux mineurs de fond) laissaient souvent leur
enfant jouer seul dans la rue et c'est là que le
jeune homme apprendra les rudiments du kickboxing, les joies
du dessin et les plaisirs de l'écriture de scénarios.
Après un bref pèlerinage dans un monastère
moyennement mystérieux du sud de la Meuse, le jeune
homme, qui a maintenant 24 ans, se voit obligé par
son père (danseur étoile) à chercher
du travail pour nourrir sa famille. Pour ce faire, il se
rend en Belgique grâce aux quelques sous épargnés
par sa mère (pilote de chasse).
A Marcinelle, le rédacteur en chef de Spirou, lui
apprend qu'il n'a aucun talent mais que par contre, "Vehlmann"
ça ressemble à "Van Hamme" et qu'avec
un peu de chance, des gens achèteront les albums
du jeune scénariste en croyant acquérir le
dernier Largo Winch.
Apprenant que leur fils est engagé par l'illustre
journal Spirou, les parents de Velhmann vendent sans regret
leur élevage de porcs et viennent s'installer en
Turquie (qu'ils croient toute proche de la Belgique).
"Je ne les ai jamais revus !" déclare
leur fils, les larmes aux yeux.
Pour noyer son chagrin, il se jettera à corps perdu
dans le travail. Il scénarisera plus d'une cinquantaine
de sommaires et plus d'une quarantaine d'histoires courtes.
Assez rapidement, il publiera en album le premier volume
de la série Green Manor (son uvre majeure avec
Denis Bodart au dessin) aux Editions Dupuis suivi de près
par Samedi & Dimanche (avec Gwen)une autre série
parue chez Dargaud.
Grand amateur de S.F, il écrit en une nuit le projet
Des Lendemains sans nuage puis engage Ralph Meyer et Bruno
Gazzotti pour en dessiner à peu prés toutes
les pages et s'en va les proposer au Lombard.
Extrait de L'Encyclopédie des Jeunes Scénaristes
Talentueux aux Editions du Morse Mort
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Fabien Vehlmann, dites-nous la part de vérité
dans tout ce ramassis de conner
euh dans ce que je viens
de lire de votre biographie ?
(Rires). Très peu de choses vraies, comme vous pouvez
vous en douter. Il s'agit en fait d'un canular que j'avais réalisé
pour la rubrique "Cher Spirou" (Spirou n°3176).
Quand Vehlmann s'auto-congratule...
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Racontez-nous alors votre véritable enfance
Je suis effectivement né en 1972, à Mont de Marsan.
Ce qui est plus ou moins vrai, c'est qu'il y a effectivement un
pilote de chasse dans la famille : mon père
J'aime
bien "mixer" un peu la réalité. Enfant,
j'avais deux grands rêves : devenir potier (mais ça
m'est très vite passé !) et dessinateur de bd. J'adorais
raconter des histoires et les mettre en scène. Plus jeune
encore, j'avais été marqué par ces soirées
où ma mère nous faisait la lecture à voix
haute de bandes dessinées.
Vous semblez avoir trouvé votre voie. Que décidez-vous
de faire ?
Je ne me sentais pas encore au point et les Beaux-Arts me faisaient
peur. A moins d'être très fort, les débouchés
sont rares. J'étais aussi intéressé par le
domaine du jouet, dont le lien avec la BD est assez évident
: permettre aux gens de "délirer" dans leur imaginaire.
J'ai alors prospecté auprès de plusieurs grandes
marques qui m'ont en gros toutes dit que si j'étais vraiment
intéressé par ça, je pouvais soit être
créateur à temps complet, soit m'occuper du marketing
en passant par une école de commerce.
Créateur de jouets
le rêve
!
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Vous passez votre Bac
Un Bac scientifique suivi d'une prépa HEC et trois ans
d'école de commerce dont je garde un mauvais souvenir
Dés la première année, j'ai réalisé
mon erreur quand, pendant un cours de marketing, j'entends la
prof dire : "Bon maintenant, on arrive à la partie
créative". Je me dis : "Ca y est ! Enfin !"
en me frottant les mains et ma prof enchaîne : "
et là vous faites appel à un créatif !".
Elle avait raison. Je ne dis pas que le marketing ne possède
pas sa part de créativité mais ça n'était
pas ce type de création que je recherchais. J'ai alors
rencontré une frustration énorme, ce qui ne m'a
pas empêché d'aller jusqu'au bout de mon diplôme
obtenu en 95.
Arrivé là, vous êtes bien loin de la
bd
C'est vrai. Mais c'est à cette période là
qu'un mini-événement a tout déclenché.
Abonnés à Spirou, je tombe un jour sur un concours
de scénario ! J'ai eu comme une révélation.
J'avais rejeté la bd parce que je ne me sentais pas au
point au niveau dessin mais je n'avais jamais pensé à
ne faire que du scénario ! Comme le concours en question
me semblait trop restrictif (pas assez de pages pour exprimer
tout ce que je voulais), j'ai décidé par jeu de
faire 20 à 30 planches et suis allé les montrer
au festival de Chambéry en 1996
où je me suis
payé quelques mémorables "vestes" !
Il y avait Thierry Tinlot qui était passé en coup
de vent et avec qui je n'ai donc pas pu parler. Et puis les auteurs
présents n'avaient pas vraiment le temps de voir mes travaux.
Il faut les comprendre, je crayonnais mes scénarios et
ça n'était pas très attractif.
Après cette succession de douches froides, j'étais
un peu anéanti lorsque j'aperçois Yvan Delporte
qui a jeté un il sur mes histoires et m'a juste dit
que ça pourrait faire une série. Pour moi, Delporte
n'était pas n'importe qui : il incarnait le Trombone
Illustré et des épisodes d'Isabelle qui
me sont chers.
Ça vous redonne du cur à l'ouvrage
Oui, encouragé de la sorte, je décidais d'envoyer
mes travaux directement à la rédaction de Spirou
: j'avais imaginé une série de gags avec comme héros
une équipe de scientifiques qui travaillaient au Laboratoire
Caillou, le nom de la série.
La science, une supercherie ? !
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Assez rapidement, j'ai reçu une lettre de Tinlot m'expliquant
ce qu'il avait ou n'avait pas aimé. On décide alors
d'un rendez-vous début 97 à Paris. Mais j'avais
trop misé sur cette rencontre. Après les corrections
que m'avait demandées Thierry, je pensais qu'en voyant
la nouvelle mouture, il me dirait trouver mon travail génial
et vouloir signer de suite ! Mais au cours de l'entretien, il
a juste fait d'autres remarques sans plus. On était revenu
au point zéro. Il attendait autre chose, mais à
ce moment là, je n'avais rien d'autre à lui proposer.
Aie !
J'ai super mal vécu ce moment. Je suis sorti de là
à genoux ! Je me suis dit que, finalement, j'allais faire
du marketing. Mais ça n'a pas duré, l'après-midi
même, j'étais reparti sur un autre projet. J'avais
le feu sacré, une profonde envie d'écrire des histoires.
Quinze jours après, j'envoie un nouveau projet relatant
les aventures de Silver Damned, un super héros du
style malchanceux
Et là silence radio.
Aie, aie !
J'ai connu une période assez perplexe de trois mois. J'ai
alors écrit à quelques auteurs pour leur demander
conseil. Luc Brunschwig a eu la gentillesse de me répondre,
même si maintenant je me rends compte de la maladresse de
ma lettre.
Extrait de la lettre envoyée à
Brunschwig
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C'était du genre : j'adore ce que vous faites et voilà
les détails pour lesquels j'adore ce que vous faites. S'ensuit
une flopée de critiques plus ou moins pertinentes que Luc
a eu la gentillesse de dépasser pour me dire que si j'avais
la volonté de le faire, je le ferais ! Sa lettre m'a vraiment
encouragé. C'est pour cela que je le remercie dans le premier
volume de Green Manor. N'ayant toujours pas de réponse
de Marcinelle, je décide d'envoyer un courrier qui était
tourné de manière un peu ironique. Ca donnait quelque
chose comme ça :
Bonjour,
Je n'ai toujours pas de réponse de votre part et
voilà quatre options qui pourraient expliquer cela
:
1) Vous avez perdu mon courrier et vous n'osez pas me
le dire.
2) Votre bureau est bancal et vous avez utilisé mon
projet pour le caler.
3) Vous avez trouvé ça trop génial
et vous cherchez un dessinateur genre Giraud pour la mettre
en image et me faire la surprise à Noël.
4) Ou bien tout simplement, vous n'avez pas aimé,
et c'est ce que je pense être le cas, mais dites-moi
pourquoi que je le sache.
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Une semaine plus tard, mon père reçoit un coup
de fil en mon absence où Thierry disait avoir lu Silver
Damned, avoir apprécié et vouloir bosser avec
moi.
Première apparition de Vehlmann dans
Spirou
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Je ne dis pas qu'il n'aurait pas lu le scénario sans cette
lettre mais là encore, c'était bienvenu de montrer
ma motivation ! Spirou avait besoin d'une équipe de scénaristes
pour ses animations. Il y avait déjà trois mousquetaires
: Zidrou, Thiriet et Janssens et dorénavant j'en serai
le quatrième.
Quelles ont été vos premières "missions"
?
On m'a proposé les sommaires assez vite. Une fois, je suis
passé à Marcinelle et l'on m'a demandé d'essayer
d'en faire quelques-uns, une sorte de galop d'essai, un entraînement
pour voir si j'étais assez souple.
Les sommaires
une institution !
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J'ai dû en réaliser une cinquantaine qui ont été
illustrés par des dessinateurs choisis via la rédaction.
Comme à ce stade, il n'y avait pas d'échanges entre
les auteurs, j'avais des surprises à chaque fois que je
découvrais le résultat final publié.
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