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Entretien avec Jean-Claude Servais

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«  Je suis un auteur provincial  » déclare Jean-Claude Servais. Force est de constater qu'il apprécie les décors naturels : les bois, la campagne, les vieilles pierres. La plupart de ces histoires dessinées se situent dans un environnement rural. Et quand il se risque dans le contemporain, c'est avec nettement moins de convictions. Sa préférence va toujours à la nature. Pour le sixième volume de Tendre Violette, le dessinateur gaumais a placé son intrigue dans l'imposant décor de la citadelle de Montmédy. Entre les murailles en ruines et les ruelles désertes, il a développé un récit mêlant chasse au trésor, amour et surnaturel…

Un personnage attachant

Créée avec Gérard Dewamme pour le magazine (A SUIVRE) en 1979, Violette est un personnage attachant. Libre et libertine, cette jolie jeune femme vit dans les bois au jour le jour, en profitant de la vie. Son parcours n'est pourtant pas des plus aisés. Fille trouvée, elle ne connaît rien de ses origines. Même si Jean-Claude Servais nous donne quelques éléments liés à son passé dans Lucye , le tome 5 de la série, la famille de Violette reste un mystère. Deux fois enceinte, la fille des bois n'aura pourtant aucune progéniture. Souvent aimée sincèrement, elle n'a point de mari. Elle reste libre comme la brise, dans un décor champêtre… à faire rêver les hommes.

L'interruption de la série, après la publication de L'Alsacien , en 1986, se poursuivra jusqu'en 2003, date à laquelle est publié Lucye  : «  C'est à la demande de Casterman que j'ai repris la série. Après plus de 15 ans, j'avais un peu perdu de vue Gérard Dewamme. Comme j'avais pris tellement de plaisir à écrire mes scénarios, c'est finalement seul –mais bien sûr avec l'accord du scénariste avec qui j'avais créé Tendre Violette- que j'ai repris les aventures du personnage. Il y a eu une première histoire il y a quelques années. Maintenant, sort Les enfants de la citadelle , la première partie d'un diptyque.  »

Alors qu'il a publié de nombreux récits durant l'interruption, Violette n'a jamais vraiment été absente de son univers : «  Si vous regardez toutes les héroïnes que j'ai dessinées depuis, elles sont toutes un peu les cousines de Violette. Revisiter le personnage aujourd'hui avec l'expérience que j'ai acquise entre-temps, c'était quelque chose de motivant. Le format en gros romans noir et blanc sous couverture brochée n'était plus de mise à l'heure actuelle. Le fait de publier ces histoires en couleurs, de relooker les albums, a permis de les mettre sur le même rang que mes titres édités chez Dupuis.  »

Une ville fantôme

Alors que ce n'étaient que des éléments qui ne se dévoilaient qu'en filigrane dans les premiers volumes, la sorcellerie et le surnaturel sont plus présents dans les deux derniers épisodes : «  C'est la première fois que je dessine un fantôme, mais le côté sorcellerie était présent dans le premier récit. Pour Les Enfants de la Citadelle, j'ai bâti mon histoire autour de la citadelle de Montmédy avec un côté fantastique, car ce lieu m'a véritablement fait penser à une ville fantôme. D'habitude, je construis mon histoire et je cherche un décor. Ici, c'est l'inverse qui s'est produit. C'est le décor qui a suscité l'intrigue. C'est un lieu qui a une telle présence, qu'il est presque un personnage à lui tout seul. En cherchant dans l'histoire locale, je suis tombé sur ce fait historique : la fuite de Louis XVI. Marie-Antoinette, qui l'accompagnait, avait confié ses bijoux à son coiffeur particulier qui était parti en éclaireur. Le roi sera stoppé à Varenne en Argonne qui se trouve un peu au-dessus de Montmédy. Le coiffeur arrivera à Montmédy, mais on ne sait pas ce qu'il devient après car on perd sa trace. Ces faits sont authentiques. A partir de là, se sont construites diverses légendes. Dont une qui situerait les bijoux enfouis quelque part dans la citadelle… On m'a même dit qu'il y aurait des habitants de Montmédy qui utiliseraient de la vaisselle datant de cette époque. Comme quoi, cela fait toujours fantasmer les imaginations... »


La Citadelle de Montmédy à l'époque de Louis XVI (1791)

Jean-Claude Servais terminera la seconde partie d'ici quelques mois : «  Je dois livrer les dernières planches en février 2007. Après quoi, je m'attaquerai à un nouveau récit pour les éditions Dupuis. J'ai quelques sujets en tête mais rien n'est encore fixé.  » Le rendez-vous est donc pris au printemps pour la conclusion des Enfants de la citadelle

Pour en savoir plus : le site officiel de Jean-Claude Servais

Propos recueillis par Marc Carlot, en octobre 2006
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Visuels extraits de la série Tendre Violette © Servais, Casterman
Photo de Jean-Claude Servais © Marc Carlot 2005
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Marc Carlot
09/11/2006