Entretien avec Romain Hugault
Romain Hugault dans son atelier © Manuel F. Picaud / auracan.com |
Allier ses deux passions, l’aviation et le dessin, Romain Hugault l’a réussi. Le jeune trentenaire a étudié le dessin à l'École Estienne et passé son brevet de pilote à l’âge de 17 ans. Il commence dans l’illustration notamment pour l’Armée de l’Air. En 2004, il entre chez Paquet qui lui construira une collection sur mesure, la collection Cockpit, après son premier album le Dernier Envol paru en 2005 et écrit avec Régis Hautière. Ce dernier lui écrit ensuite le diptyque Au-delà des Nuages paru en 2006 et 2007. En 2008, il commence le diptyque Le Grand Duc écrit par Yann sur la Seconde Guerre mondiale et poursuit avec le même illustre scénariste sur la Première Guerre mondiale avec Le Pilote de l’Edelweiss. Rencontre avec une star de la BD aéronautique dans son atelier parisien.
Le Pilote de l’Edelweiss © Romain Hugault / Paquet |
Pourquoi la 1ère Guerre Mondiale ?
Yann m’a demandé ce que j’aimerais dessiner dans une nouvelle série. J’ai répondu l’aviation pendant la Première Guerre mondiale peu traitée jusqu’à présent. Je connaissais un peu la question sans vraiment la connaître. Et du coup, plus je me penche sur le sujet en le dessinant, plus je découvre des choses intéressantes. C’était un peu le parent pauvre de la BD aéronautique !
Comment se passe la collaboration avec Yann ? Le duo avec Yann fonctionne très bien. Pour cet album, comme d’habitude, Yann s’est documenté énormément, puis m’a proposé un synopsis génial. On reconnaît là un scénariste qui a énormément de bouteille. Ensuite, il passe au découpage et me propose les trois tomes les uns à la suite des autres, et il ne me reste plus qu’à les dérouler et à dessiner les albums.
Le Pilote de l’Edelweiss © Romain Hugault / Paquet |
Le Pilote de l’Edelweiss © Romain Hugault / Paquet |
C’est plutôt moi pour la documentation visuelle, les avions, les camouflages, les uniformes,... En revanche, il m’apporte des petites anecdotes. Par exemple une photo sur un pilote qui a personnalisé son avion ou son uniforme peut être réutilisée et donner du poids au scénario. J’ai pu constater qu’on rebondissait souvent sur des détails découverts ainsi ou dans une discussion avec un historien. En creusant, on trouve un élément original et on change le scénario pour en tenir compte.
À l’époque y avait-il beaucoup de signes tels l’edelweiss sur les avions ?
Justement en se documentant, Yann est tombé sur un énorme Albatros avec un edelweiss dessus. On s’est finalement aperçu qu’il y avait énormément de dessins et de personnalisation des appareils. Et les représentations étaient souvent très bien faites car dans les escadrilles figuraient beaucoup d’illustrateurs qui palliaient la rareté des photographes. Et comme l’emblématique Baron rouge, les pilotes voulaient être reconnus dans le ciel pour que les adversaires sachent à qui ils ont à faire.
Avez-vous davantage travaillé vos personnages dans cet album ?
Je sais que c’est mon point faible et je continue donc à travailler ce domaine, et surtout de ne pas baisser de niveau d’album en album. J’ai changé de technique dans cet album. Auparavant, je passais à l’encre de Chine et plume avant la mise en couleur à l’ordinateur. Là je reste au crayon, qui me donne plus d’aisance, me permettant d’avoir un velouté de trait plus élégant qu’à l’encre où je suis peut-être plus maladroit. Je trouve que cela me correspond assez bien.
Romain Hugault dans son atelier © Manuel F. Picaud / auracan.com |
Quels sont les secrets de votre mise en couleurs ?
J’ai fait un peu de peinture quand j’étais plus jeune. Pour moi, la couleur est extrêmement importante. Quand on voit les planches en noir et blanc, on peut avoir l’impression d’un avion flottant dans une case blanche, parce que je sais que derrière je vais réaliser un ciel à la peinture numérique. Et j’essaye d’avoir une colorisation comme si j’étais en mode traditionnel. J’utilise une tablette graphique avec un stylo, comme si je peignais, avec le moins de calques possible et en proscrivant les effets d’ordinateur trop léchés ou trop faciles. Pour un dégradé, je vais prendre deux teintes que je vais mélanger et non un clic « dégradé » pour qu’on ressente la texture et la patte du crayon. Mon but est qu’on se demande si j’ai travaillé à l’ordinateur ou au pinceau.
Le Pilote de l’Edelweiss est-il un triptyque ou cela peut évoluer ?
C’est en effet prévu en trois tomes. Le scénariste aimerait évidemment avoir plus de place. Mais un album de plus signifie un an de plus avec les mêmes personnages. Or j’ai plein d’idées pour d’autres projets après celui-là. Je trouve que trois ans sur un même projet constituent un bon rythme pour ne pas se lasser avec les personnages, tout en développant plus profondément l’histoire que dans un diptyque ou un one-shot.
Le Pilote de l’Edelweiss © Romain Hugault / Paquet |
Avez-vous déjà des projets qu’on puisse évoquer ?
J’ai déjà trois à quatre idées qui tournent dans ma tête. Il ne faut pas que je commence à me documenter sur le sujet car je risque de n’avoir plus qu’une seule envie, à savoir de m’y attaquer. Pour le moment, je suis sur le tome 2 du Pilote de l’Edelweiss. Je me pencherai sur la suite six mois avant la fin du troisième tome. En deux ans, je peux découvrir encore plein d’idées. Donc je me laisse encore des portes ouvertes. Mais un album avec des pin-ups cela me dirait bien !
Le Pilote de l’Edelweiss © Romain Hugault / Paquet |
Quels sont enfin les projets de la collection Cockpit ?
Il y a de beaux projets encore au niveau des balbutiements et je ne peux donc malheureusement pas encore en parler. Nous essayons de conserver le fil rouge de la qualité et de ne pas multiplier les albums sous prétexte que la BD d’aviation marche bien en ce moment. Avec Pierre Paquet, nous essayons de garder notre ligne de qualité avec des auteurs passionnés et doués qui aiment vraiment la BD d’aviation et non qui y viennent parce que le créneau est porteur.
Photos © Manuel F. Picaud / auracan.com
Illustrations série Le Pilote de l’Edelweiss © Romain Hugault / Paquet
Propos recueillis par Manuel F. Picaud en mars 2012
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Blog de Romain Hugault : romain-hugault.blogspot.com Chronique : Le Pilote de l'edelweiss |