Les Racines du chaos
Tome 1 : Lux
Scénario : Felipe Hernandez Cava
Dessins et couleurs : Bartolomé Segui
Dargaud
Promesse d'un attentat
L’éditeur de Blake et Mortimer propose une autre histoire de pure espionnage dans les années 50. Cette période de guerre froide et sans les moyens de communication et de surveillance moderne offre en effet la possibilité de nombreux récits à rebondissements multiples et aussi un esthétisme à la mode comme le prouve les nombreuses séries en cours comme Lefranc de Jacques Martin recentré sur les années 50 chez Casterman ou Les Aventures de Masson et Kaplan de Didier Convard. L’histoire proposée par Felipe Hernandez Cava s’intéresse aux Balkans et plus particulièrement à la Yougoslavie de Tito. Libérant son pays du jougs nazi Josip Broz alias Tito devient Maréchal de Yougoslavie le 29 novembre 1943, date qui figure en couverture de l'album et cumule aussi à partir de 1953, année où se déroule cet album, les fonctions de premier ministre fédéral et de chef du parti communiste.
Le héros malgré lui est Alexandre Ostojic un trentenaire d’origine yougoslave travaillant à Londres au département de chimie de médecine légiste de Scotland Yard. Alors qu’il s’apprête à commettre un attentat contre le Maréchal Tito en visite à Londres, il raconte comment il en est arrivé à cette issue. Tout a commencé après le décès en pleine rue de sa mère pourtant très âgée et théoriquement enfermée dans une maison de retraite. A sa grande surprise, il apprend par les services secrets qu’elle a été renversée alors qu’elle transportait une bombe en compagnie d’un assassin croate. Désireux d’élucider ce mystère, il accepte de collaborer avec les services secrets britanniques et notamment l’envoutante Vanessa...
Ce diptyque dense et très bien écrit intrigue dès son entrée en matière. Une fois commencé, il est difficile de ne pas succomber à cette enquête troublante au cœur de la géopolitique des années 50 et des conflits internes de la Yougoslavie. Le scénariste espagnol renommé prend le temps de tisser sa toile et fait monter la pression dont il faudra évidemment attendre le dénouement dans le second tome. Il est à nouveau associé – comme dans Les Serpents aveugles (Dargaud, collection Long courrier) – au dessinateur Bartolomé Segui originaire de Majorque. Celui-ci réussit parfaitement par son trait sombre et gras, ses visages typés, ses couleurs directes à reconstituer l’atmosphère pesante voire angoissante dans la capitale britannique brumeuse.
Décidément la bande dessinée espagnole recèle de véritables trésors !