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Alger la noire, par Jacques Ferrandez d'après Maurice Attia, Jacques Ferrandez, collection Univers d'Auteurs (Casterman)

Alger la noire

Scénario : Jacques Ferrandez d'après Maurice Attia
Dessins et couleurs : Jacques Ferrandez

Casterman, collection Univers d'Auteurs

Maurice Attia par Jacques Ferrandez

Il y a des adaptations totalement naturelles et attendues. Après la nouvelle L'Hôte d'Albert Camus adaptée chez Gallimard en 2009, Jacques Ferrandez s'attaque à Alger la noire, un polar social et historique sur les événements d'Algérie écrit par Maurice Attia. Là encore, ce récit sombre apparaît comme  un prolongement évident et incontournable de son immense saga Carnets d'Orient. Son regard plein d'objectivité dont il a fait preuve depuis un quart de siècle dans cette œuvre se retrouve totalement dans ce nouvel opus.

Alger, 22 janvier 1962. Un double crime dans une mise en scène spéciale et macabre sur une plage de Padovani, à Bâb-el-Oued : Estelle, une jeune femme blanche et Mouloud, un jeune mahrébin, ont été assassinés, tous deux nus et les corps entremêlés, les lettres OAS inscrites sur le dos.  Attentat ? Règlement de comptes ? Vengeance familiale ? Ou une histoire encore plus glauque ? Pour les deux policiers chargés de l'enquête, la piste évidente est trop visible. Dans une ville en ébullition, le jeune inspecteur de police, Paco Martinez, et son coéquipier futur retraité, Maurice Choukroun, tiennent à faire la lumière sur ce drame. Ils ne sont pas au bout de leurs surprises...

Cet épais album de 132 pages se lit d'une seule traite et se relira avec plaisir, signe d'un album riche. La raison en est une enquête difficile, mais racontée avec une belle fluidité, des dessins détaillés et très documentés, des références historiques précises. Cette fresque permet en effet de se plonger une nouvelle fois aux heures sombres de la Guerre d'Algérie qui n'en porte pas encore le nom. L'enquête permet dans un premier temps aux policiers de fuir la guerre civile qui les entoure mais qui les rattrape dans un second temps. Chacun des personnages est campé de manière magistrale dans toute sa complexité, même si le protagoniste central est sans doute Paco, le fils d'un anarchiste espagnol assassiné durant la guerre d'Espagne et à qui ces événements rappellent son propre passé familial. Au-delà, le romancier présente une fresque sociale et peu ragoutante au cœur de la bourgeoisie algéroise. Au pinceau, Jacques Ferrandez donne toute sa mesure à ce récit qui comme toujours interroge les faits historiques.

Moralité : Alger n'est plus si blanche mais bien noire...

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Manuel F. Picaud

Du même auteur :

Carnets d'Orient - T10Cuba Père et FilsFerrandez, une monographie

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27/03/2012