Auracan » chroniques » Les Quatre Coins du Monde - Tome 1
Les Quatre Coins du Monde  - Tome 1, par Hugues Labiano  (Dargaud)

Les Quatre Coins du Monde

Tome 1

Scénario et dessins : Hugues Labiano
Couleurs : Jérôme Maffre

Dargaud

Civilisation française dans le désert algérien

Pour son premier album comme auteur complet, Hugues Labiano se penche sur un nouvel aspect de la Première Guerre mondiale et de l'Histoire française en Algérie. Après six épisodes de la très efficace série d'espionnage presque contemporaine Black Op signée par Stephen Desberg au scénario, il retourne donc dans le passé et dans un univers rarement mis en images en bande dessinée. Il éclaire ainsi les événements du début du XXe siècle sous un angle particulièrement original.

Le récit se situe entre 1913 et 1919 dans l'Hoggar, un massif montagneux désertique à l'Ouest du Sahara et dans le Sud de l'Algérie. Quelques militaires français y sont installés pour y imposer l'ordre entre les différentes composantes de la population indigène nomade, les chaambas arabes et les touaregs berbères. En 1919, le capitaine Dupuy, le lieutenant Dewaere et quelques méharistes ou tirailleurs sont envoyés à la recherche d'une patrouille commandée par le charismatique capitaine Barentin, véritable "légende vivante", qui n'a pas donné de nouvelles depuis quinze jours alors que des pillards écument le secteur du puits d'Indenn. Il est probable qu'ils aient été exterminés...

Les Méharistes dans le désert chevauchant leur dromadaire évoquent forcément l'épopée guerrière et utopique de Lawrence d'Arabie. Mais ce récit d'aventures héroïques  s'intéresse aussi aux mœurs du désert. Il approfondit l'intégration d'une "troupe illuminée de volontaires" et la population locale où chacun apprend de l'autre. Mais au loin gronde le conflit mondial qui n'épargne pas la contrée reculée. Faite de flash forward et flash back, au rythme lent du désert, l'histoire humaine se lit comme une enquête policière mais aussi sociale et humaniste. Tout en partageant ses connaissances didactiques avec de nombreuses expressions méconnues, l'auteur s'y livre à des réflexions sur la "folie" des hommes et la mission "civilisatrice". C'est donc à la fois palpitant, intimiste et instructif. Le dessin plutôt réaliste, très documenté dans les uniformes et affiné - sans ces personnages angulaires caractéristiques de la série précédente - traduit cette atmosphère presque de huis clos dans le désert où les visages et les regards éclairent les planches. Sans doute la lumière est elle accentuée par les couleurs sablonneuses somptueuses de Jérôme Maffre, qui, curieusement, parent le ciel tellement bleu de blanc tirant vers le sable.

Une excellente mise en bouche qui se soldera déjà dans un second tome annoncé dans un court délai. Se révèlera alors totalement la signification du titre qui semble évoquer la variété du fascinant Sahara. 

Partager sur FacebookPartager
Manuel F. Picaud
04/07/2012