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Le Silence de Lounès, par Baru, Pierre Place, collection Univers d'auteurs (Casterman)

Le Silence de Lounès

Scénario : Baru
Dessins et couleurs : Pierre Place

Casterman, collection Univers d'auteurs

Colères

Baru est connu pour sa sensibilité sociale et, via celle-ci, ses prises de position marquées. Le Silence de Lounès s'inscrit dans cette veine. Il part de l'amité entre Nouredine et Gianni, ouvriers d'un chantier naval à Saint-Nazaire, en lutte pour le maintien de celui-ci. Il nous retrace une partie de l'histoire de Lounès, père de Nouredine, pendant la guerre d'Algérie et au sortir de celle-ci, et de son arrivée en France. Lounès et son silence, qui, indirectement, amèneront Nouredine à une conduite de plus en plus radicale, et finalement désespérée. L'intrigue est complexe, violente et réaliste, portée par la colère ou plutôt les colères de ses différents protagonistes.

Sa mise en image a été confiée à Pierre Place, et son dessin fait ici figure de véritable révélation. Son trait s'est assoupli et affiné pour ce roman graphique de plus de 140 pages. Par sa forme et sa thématique, on peut penser que celui-ci aurait aisément trouvé sa place dans la belle collection Écritures du même éditeur, mais cela nous aurait privés de l'admirable travail sur les couleurs effectué par le dessinateur. Ses aquarelles remarquables servent idéalement les différentes ambiances du récit, des impressionnants affrontements avec les crs au chantier naval aux scènes de guerre, en passant par la recherche de Nouredine par Gianni et Samia en Algérie ou par des moments plus intimistes. La qualité d'impression du livre les restitue, soulignons-le, de fort belle manière.

Aussi âpre que riche, alternant lieux et époques, Le Silence de Lounès demande plusieurs lectures pour être vraiment apprécié, mais ouvre à la réflexion sur la transmission entre générations, l'immigration, l'Algérie aujourd'hui ou même la radicalisation religieuse... Ca fait beaucoup, peut-être même trop en un seul tome, mais il est certain que Le Silence de Lounès et son amertume suivront longtemps le lecteur après avoir refermé l'album.

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Pierre Burssens

Du même scénariste :

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15/12/2013