Station 16
Scénario : Yves H.
Dessins et couleurs : Hermann
Le Lombard, collection Signé
Attention, les yeux !
Signé, la belle collection du Lombard parfois considérée comme la petite sœur d’Aire libre (Dupuis) fête ses 20 ans en 2014. Parallèlement à une réédition de La femme du magicien de Boucq et Charyn, Station 16 ouvre son programme éditorial anniversaire. Voilà qui semble assez logique, Hermann se situant, avec 5 albums en solo ou associé à son fils au scénario, comme un des piliers de Signé.
Géant de la BD, fabuleux dessinateur, Hermann a cependant déçu ses admirateurs plus d’une fois au cours de ces dernières années, en délivrant des albums de qualité inégale qui laissaient parfois une impression de facilité (dans sa série Jeremiah, notamment…). Que l’on se rassure tout de suite, Station 16 appartient incontestablement au dessus du panier de la production du vieux lion.
Yves H. s’est inspiré de l’histoire de la Nouvelle-Zemble, bout de territoire oublié de la Russie arctique, et zone toujours interdite aujourd’hui, théâtre des essais nucléaires soviétiques, qui ont culminé avec le largage de la Tsar bomba, d’une puissance équivalent à 1400 fois celles, cumulées, des bombes américaines utilisées à Hiroshima et Nagasaki.
À partir de là, le scénariste a construit un thriller fantastique, jouant sur les paradoxes temporels, et emmenant le lecteur dans une atmosphère proche de celle du film Silent hill. L’intrigue de Station 16 surprend, secoue, et même si sa pirouette finale a des allures de déjà-vu, elle fait preuve, à l’image de tout l’album, d’une redoutable efficacité. Hermann, revenu à la couleur directe, nous offre une très belle démonstration de tout son art, et innove même en abordant quelques très grandes cases qui se déclinent sur deux planches. Décors désolés, visages durs et marqués, le dessinateur est un familier des environnements âpres et se trouve visiblement à l’aise dans celui de Station 16.
Résultat : frissons garantis, et pas seulement pour une question de climat !