Auracan » chroniques » Fatale
Fatale, par Doug Headline d'après Jean-Patrick Manchette, Max Cabanes, collection Aire libre (Dupuis)

Fatale

Scénario : Doug Headline d'après Jean-Patrick Manchette
Dessins et couleurs : Max Cabanes

Dupuis, collection Aire libre

La voyageuse

Aimée a tout pour plaire aux notables de Bléville : jeune, belle et veuve, elle s'intègre rapidement dans la bourgeoisie de cette petite ville de province rongée par l'habituel cocktail d'histoires de fesses et d'histoires de fric qu'on garde entre soi. Aimée attend la crise inévitable, celle qui finit toujours par éclater. Alors elle pourra enfin jouer franc jeu avec tous ces pourris, et les faire payer, dans tous les sens du terme. Car ce que personne ne sait, c'est qu'Aimée est une tueuse professionnelle...

Après La Princesse du sang, oeuvre inachevée de Jean-Patrick Manchette, c'est à l'adaptation d'un autre de ses romans que s'attachent son fils, Doug Headline, et Max Cabanes. Curieusement, alors que le romancier le considérait comme une oeuvre expérimentale,  il devait être écrit que Fatale avait rendez-vous avec le BD. Tardi avait en effet illustré la couverture du roman original avant de s'attaquer à un début d'adaptation. Une vingtaine de planches en avaient été dessinées avant que les deux auteurs interrompent ce travail pour se tourner vers Griffu.

À l'image de La Princesse du sang, mais sous des cieux qui nous semblent plus familiers, Max Cabanes et Doug Headline atteignent remarquablement leur cible avec ce volumineux album (130 pages). L'arrivée de cette femme séduisante et mystérieuse dans une petite ville de la côte, son approche de ce milieu et, finalement, la découverte du "détonateur" qu'elle va tenter de manipuler construisent un intrigue prenante qui s'éclaire très progressivement. Le scénario n'est pas avare de texte, mais plutôt dans les narratifs que dans les dialogues. Des narratifs, rythmés, qui installent et développent l'atmosphère, la détermination du personnage principal comme la noirceur derrière les jolies façades des notables de Bléville.

Graphiquement, Max Cabanes déploie tout son talent en combinant différentes techniques et chaque planche, si pas chaque case mérite  véritablement que l'on s'y attarde. Il donne formidablement corps à cette femme... fatale, certes redoutable, peut-être trop sûre d'elle en se plongeant dans un véritable panier de crabes non moins dangereux. Le travail audacieux qu'il effectue sur les couleurs sert lui aussi le récit de manière remarquable.

Adaptation ambitieuse et réussie, on se souviendra aisément de Fatale parmi les très nombreuses sorties de cette rentrée 2014. Noir et puissant !

Partager sur FacebookPartager
Pierre Burssens
03/10/2014