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La Couleur de l'air, par Enki Bilal (Casterman)

La Couleur de l'air

Scénario, dessins et couleurs : Enki Bilal

Casterman

Le coup de sang

Dans un ciel sens dessus dessous ponctué d’immenses masses nuageuses aux allures menaçantes progresse le zeppelin sinistré Garbage et son équipage incongru : un couple de passagers de hasard embarqués à Tanger, deux jumelles orphelines sujettes à de mystérieuses crises de citations littéraires, leur garde du corps et le cadavre démembré du pilote de l’appareil. Dans les soutes, un mélange de déchets nucléaires instables et d’armes atomiques en état de marche, indice probable des visées terroristes du Garbage. Balloté au gré de la violence des vents, ses équipements verrouillés sur navigateur automatique, l’aérostat semble totalement livré à lui-même, et pourtant…

La Couleur de l'air clôture la trilogie du Coup de sang, du nom d'un dérèglement climatique brutal et généralisé qui s'est abattu sur la terre. Ce triptyque avait débuté avec Animal'z avant de se poursuivre avec Julia et Roem. Dans La Couleur de l'air, la nature, après avoir craché sa colère, entreprend de se recomposer sur les ruines d'un monde dévasté. Les groupes de survivants convergent vers des points de ralliement. On retrouve ainsi les protagonistes des deux volumes précités et l'étrange équipage du Garbage. Animal'z était placé sous le signe de l'eau, Julia et Roem de la terre, et ce volet se veut aérien.

Enki Bilal livre un récit à facettes multiples, aux marges de la philosophie, de la science-fiction et du surréalisme. L'auteur a depuis longtemps transcendé le format BD pour alimenter progressivement une oeuvre riche et complexe, faite de réflexion et de propositions. Ici, à travers l'itinéraire de ses personnages, c'est in fine sur l'évolution de la planète, notre planète, qu'il se penche. Aborder La Couleur de l'air sans avoir lu les deux premiers volets de la trilogie s'avère difficile et décontenançant. Et même en les ayant lu, Bilal reste Bilal dans toute la force de son originalité.

Graphiquement, il nous offre une fois de plus une démonstration magistrale de son style et de son talent. La Couleur de l'air débute dans la continuité des deux albums précédents pour gagner peu à peu en couleurs, avec un retour à la peinture. Conte philosophique ? Fable de SF ? Cet album se dévoile difficilement, mais mérite assurément quelques efforts pour que l'on savoure son étrange pouvoir de fascination.

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Pierre Burssens
04/12/2014