Les 3 fruits

Scénario : Zidrou
Dessins et couleurs : Oriol

Dargaud

Le prix de la vie

Après 40 années de règne, un vieux souverain arrive au terme de sa vie. La peur de mourir devient son obsession. En échange de la vie éternelle, il promet sa fille à un mage terrifiant. Ce dernier lui apprend qu'il devra également manger la chair de son fils le plus valeureux... Pour désigner celui-ci, le roi envoie ses trois fils affronter trois périls, en leur faisant croire que celui-qui reviendra victorieux lui succèdera sur le trône...

Après la réussite de La peau de l'ours l'année dernière, le duo Zidrou-Oriol se reforme pour un nouveau one-shot complètement différent. En effet, Les 3 fruits prennent la forme d'un conte noir et cynique, d'autres évoqueraient une histoire de dark fantasy ! Seul un personnage de belle princesse (et encore...) subsiste des images généralement associées aux contes classiques. Le roi est fou et cruel, dominé par un mage démoniaque. Les objets des quêtes d'Hubert, Vernon et Martin, les 3 princes, sont vraiment monstrueux... et pourtant il se dégage du récit qui nous est offert un climat de (très) sombre poésie .

Narrativement, Zidrou se joue des ficelles du récit conté pour mieux jouer avec. Ainsi, en première partie de cette longue histoire (80 pages), il insiste par moment sur les aspects répétitifs (3 savants consultés, 3 fils partis en quête...) mais en les distanciant assez et en les différenciant finement pour qu'ils ne soient jamais lassants. Plus globalement, outre la qualité littéraire certaine que l'auteur apporte à son récit, on pourrait sans doute parler de redynamisation du conte en évoquant ces 3 fruits, sinistres et pourtant envoûtants.

Une sombre séduction parfaitement complétée par les choix graphiques d'Oriol Herñandez. Le dessinateur modifie totalement son approche par rapport à son album précédent. Il traite cette nouvelle histoire dans un style très "peinture", qui semble à la fois influencé par l'expressionisme et la période la plus sombre et torturée d'un Goya. Épousant la noirceur du récit, le dessinateur-coloriste privilégie la couleur "matière" et les tons foncés pour en faire émerger ses personnages, leur présence et leurs tourments. Son travail renforce une symbiose rarement atteinte à un tel point entre l'histoire, le texte et les images.

Du côté des parutions, ce début d'année semble décidément privilégier la qualité plutôt que la quantité. Les 3 fruits ne remettront sûrement pas en cause cette bonne impression !