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Chaque soir à onze heures, par Eddy Simon d'après Malika Ferdjoukh, Camille Benyamina (Casterman)

Chaque soir à onze heures

Scénario : Eddy Simon d'après Malika Ferdjoukh
Dessins : Camille Benyamina
Couleurs : Blackburn, Benyamina et Dumas

Casterman

Fausse Malice

Habituée à frayer avec la jeunesse dorée et superficielle des beaux quartiers, Willa rencontre le séduisant Edern Fils-Alberne. Celui-ci éveille la curiosité et l'intérêt de la jeune femme et l'invite à Fausse Malice, la villa des Brouillards perdue au fin fond de Montmartre. Elle y fait la connaissance de Marni, la soeur d'Edern, jeune pianiste aveugle qu'elle va accompagner. Peu à peu, Willa découvre que bien des secrets pèsent sur la famille Fils-Alberne, et ceux-ci semblent se cristalliser dans cette demeure qui paraît hors du temps.

On avait découvert l'an dernier la belle association d'Eddy Simon et de Camille Benyamina avec le saisissant Violette Nozière, vilaine chérie et il paraissait alors évident que ce duo méritait d'être suivi. Avec ce nouvel album, ils réalisent l'adaptation du roman éponyme de Malika Ferdjoukh. L'histoire débute de façon relativement banale et se complexifie peu à peu. En progressant dans la lecture, on mesure qu'Eddy Simon utilise chaque scène comme une pièce de puzzle au service d'une intrigue de plus en plus inquiétante. L'atmosphère étrange de Fausse Malice et le côté décalé de ses occupants renforcent cette sensation. Cependant, il serait fort difficile de coller une étiquette à Chaque soir à onze heures, car jamais on n'a l'impression d'être totalement face à un polar, ou à un thriller, ou a une histoire sentimentale. Mélange des genres ? Réelle originalité ? De quoi contribuer, en tous cas, à la surprise et au plaisir de la lecture.

Visuellement, les planches de Camille Benyamina séduisent une fois de plus. L'auteure a conservé à son dessin davantage de spontanéité que pour Violette Nozière, avec une sensibilité qui correspond joliment à celle de Willa, héroïne de cette étrange aventure. Un petit cahier graphique complète l'album et permet de comprendre et d'apprécier plus encore sa technique, mêlant étroitement le trait et l'utilisation des couleurs à différents stades du travail. De quoi renforcer l'envie, déjà bien présente lors d'une première lecture, de s'attarder sur une case, une planche, un clair-obscur maîtrisé.

Peut-être, comme l'explique Malika Ferdjoukh : "...pour observer ensuite par quelles routes, quels détours ou quels raccourcis le dessinateur choisit de capturer (ou non), de resituer (ou non), d'interpréter (ou non) les mots ! Comment un adjectif devient une couleur, un verbe un mouvement, une métaphore écrite une métaphore visuelle, comment une virgule devient un souffle ou une gifle. Ou, plus surprenant encore, comment une absence, un non-dit, devient un trait d'aquarelle, une ligne au pinceau".

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Pierre Burssens

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Pour en savoir plus : le site de Camille Benyamina

16/05/2015