Dilemma

Scénario et dessins : Clarke
Couleurs : Cerise

Le Lombard

Jeux d'esprit

Grèce, 1934. Un jeune archéologue allemand découvre des manuscrits anciens au fond d'une grotte. Ils ont été rédigés par de grands philosophes tels que Platon ou Aristote, sur le thème du déterminisme. Par jeu, ces penseurs ont tenté de prévoir l'avenir du monde en se basant sur les éléments qu'ils en connaissaient. Et ils semblent avoir réussi. Que faire quand on a dans les mains toutes les clés pour faire perdre ou gagner une terrible guerre à venir ? Peut-on rester un patriote dans un pays dirigé par les Nazis ?

Alors qu'il s'agissait, au départ, de conversations entre philosophes, de jeux d'esprit, Xenophon, ancien général, trompe le hasard pour que les textes de ces penseurs façonnent peu à peu notre histoire. Jusqu'à une guerre qui doit bouleverser l'ordre du monde afin que celui-ci puisse se reconstruire selon un autre schéma. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Michael Dorfmann et sa mère découvrent les écrits de ces pères de la philosophie. Les Nazis en sont avertis et Himmler désire les exploiter pour la loge de Thulé. Commence donc une traque de l'archéologue qui assiste, indirectement, aux premliers événements du conflit.

Si Clarke est essentiellement connu pour sa charmante petite sorcière Mélusine, il développe depuis quelques années, en parallèle, un parcours original dans une veine réaliste. Les thèmes qu'il aborde sont généralement étonnants et la tradition est respectée avec cet ambitieux Dilemma. L'auteur signe un imposant roman graphique de 130 pages et un scénario qui trouve l'équilibre entre thriller et réflexion(s) philosophique(s).

Avec un tel sujet, le récit aurait aisément pu basculer dans une aventure à la Indiana Jones, mais c'est avec beaucoup plus de retenue que Clarke dévoile progressivement son audacieuse histoire. L'auteur nous emmène d'une époque à l'autre pour mieux nous faire comprendre la concrétisation, fin des années 30', des idées évoquées en 354 avant J-C. On est certes dans la fiction, mais force est de reconnaître que l'idée de départ est impresssionnante et fort bien exploitée.

Dans les dernières pages, le héros se retrouve confronté à un dilemme qui le dépasse. Il doit opérer un choix. Dilemma a ainsi droit à deux fins alternatives, et le même album se voit édité en deux versions, sous deux couvertures différentes. Mais au-delà de cette coquetterie éditoriale, c'est bien au récit général que l'on accroche - on ne s'y ennuie pas du tout - et au talent de Clarke qui parvient, une nouvelle fois, à surprendre !