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Soleil brûlant en Algérie, par Gaétan Nocq, collection Contre Coeur (La Boîte à Bulles)

Soleil brûlant en Algérie

Scénario, dessins et couleurs : Gaétan Nocq

La Boîte à Bulles, collection Contre Coeur

Les silences de la guerre

Appelé du contingent, Alexandre Tikhomiroff dit Tiko, 21 ans, débarque en 1956 sur les collines brûlées d’Algérie, déjà secouées par la guerre d’Indépendance. Sur le chemin qui le mène d’Alger à l’école d’infanterie de Cherchell, il découvre avec fascination cette terre inconnue et son éblouissante lumière. Mais il peut difficilement fermer les yeux sur ce qui se passe alentour, ces fameux événements d’Algérie, euphémisme de l’époque pour désigner une guerre coloniale…

La guerre d'Algérie a été relativement peu relatée en BD, et Gaétan Nocq a choisi de le faire en adaptant le récit autobiographique d'Alexandre Tikhomiroff Une caserne au solei (L'Harmattan). Plus qu'une évocation purement militaire, Soleil brûlant en Algérie constitue avant tout un témoignage humain, celui d'un jeune appelé, incorporé le 11 novembre (!) 1956 envoyé dans un pays dont il ignore tout, qui le séduit, le fascine, mais dont il ne peut ignorer les dangers. 

Caserné à l'école militaire de Cherchell, une "fabrique à officiers", Tiko y découvre un système, l'attente, et les grandes ou petites combines pour, par exemple, bénéficier d'un steack plutôt que des tripes qui constituent le menu quotidien des soldats. Puis vient le départ, les événements qui se précipitent (parfois), le retour en France et un Noël à Paris troublé par les manifestations de différentes tendances et les attentats de l'OAS, qui prennent à l'occasion des allures de reflets dans un miroir de ce qui se déroule à Alger.

Gaétan Nocq signe ici sa première BD avec cet imposant roman graphique et restitue bien les situations parfois absurdes ou surréalistes auxquelles est confronté Tiko. L'auteur prend son temps pour nous décrire toute la lourdeur de l'attente, mais aussi la beauté des paysages algériens. Humour et drame se côtoient dans ces 230 pages réalisées en noir et blanc. L'auteur a choisi le crayon pour s'exprimer avec beaucoup de sensibilité. Son découpage parfois très "graphique" dépasse le cadre d'une BD traditionnelle et on en vient à se demander, en tournant une page, quelle surprise formelle nous réserve la suivante. Une raison parmi d'autres, outre sa qualité de témoignage d'une guerre étouffée, pour laquelle Soleil brûlant en Algérie mérite d'être découvert.

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Pierre Burssens

Pour en savoir plus : le blog de l'auteur

14/03/2016