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Louise, le venin du scorpion, par Chantal Van den Heuvel, Joël Alessandra (Casterman)

Louise, le venin du scorpion

Scénario : Chantal Van den Heuvel
Dessins et couleurs : Joël Alessandra

Casterman

Brooksie

Louise Brooks fut l'égérie des Flappers. Avec sa coupe à la garçonne, elle fit chavirer bien des coeurs et traça une voie nouvelle au coeur des années folles. Blessée dès son plus jeune âge, elle n'eut jamais grâce aux yeux de sa mère. De là naquirent son sentiment d'échec permanent et son inextinguible besoin de fuite en avant. Icône cinématographique, sa carrière fut paradoxalement très brève, et elle paya le prix fort pour ses prises de position par rapport au système hollywoodien et aux hommes...

Peut-être pourrait-on parler d'un biopic de Loulou, tant Louise Brooks est associée au personnage qu'elle interprète dans le film de Georg Wilhelm Pabst de 1929. Derrière cette image, on connaît assez peu de choses de l'artiste et de la femme, et c'est avec intérêt que l'on découvre différentes facettes de sa carrière et de sa personnalité au gré des 120 planches de ce roman graphique. Chantal Van den Heuvel nous présente un personnage versatile et fragile, fantasque et sensible, avide de fêtes et d'hommes pour mieux cacher ou anesthésier ses fêlures intimes. Le scénario est construit en courts épisodes, allant d'une époque à une autre, pour tenter de mieux expliquer, et surtout de mieux faire comprendre...

Malgré ses excès, on s'attache à Louise, on espère pour elle, mais quand elle semble reprendre pied, c'est pour encourir une nouvelle déception et replonger dans l'amertume. Étoile filante à la trajectoire tourmentée, Louise dresse aussi le portrait d'une industrie capable de fabriquer rapidement une star mais de la broyer tout aussi vite. 

On ne s'attendait pas forcément à retrouver le dessin et les aquarelles de Joël Alessandra dans une telle évocation. On connaît son attrait du voyage, des grands espaces et de la lumière qui baignent traditionnellement ses albums. 

Ici, Alessandra choisit une palette plus sobre, applique un découpage plus serré et nous offre à nouveau de fort belles planches, s'octroyant même l'un ou l'autre  dessin en "pleine page". On saluera aussi un très beau travail en noir et blanc quand il reconstitue certaines scènes de Loulou. Entre éclats et amertume, Louise, le venin du scorpion permet de (re)découvrir un personnage devenu emblématique.

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Pierre Burssens
24/05/2016