Brûlez Moscou

Scénario : Kid Toussaint
Dessins et couleurs : Stéphane Perger

Le Lombard, collection Signé

Dans le brasier

1812. Les armées de Napoléon s'apprêtent à entrer dans Moscou. Le gouverneur Rostopchine fait détruire les bouches d'incendie et libérer tous les prisonniers de droit commun avec un seul mot d'ordre : ils seront amnistiés s'ils acceptent d'incendier la ville. Au coeur du brasier infernal qu'est devenu Moscou, un homme est totalement indifférent au danger. Anatoli est prêt à tout pour atteindre un but inatteignable : retrouver sa famille.

Ce nouveau scénario du prolifique Kid Toussaint nous projette au coeur d'une certaine vision de l'enfer, historique, puisque la majeure partie de l'histoire se déroule à la lueur du fameux incendie. Mais si les flammes s'en prennent aux bâtiments, elles consument aussi de l'intérieur Anatoli Lenski, l'étrange héros de cette aventure, mû par l'énergie du désespoir.

L'auteur dévoile progressivement et habilement ses cartes, emmenant lecteur et personnages principaux dans des directions inattendues. On parie sur un thriller, avec l'affrontement de Kolia, l'ogre de Moscou ? Non, ce n'est qu'un élément d'une intrigue plus riche que l'on apprivoise peu à peu en suivant le périple de la dernière chance d'Agneska, Anatoli et Sergueï, réunis pour survivre dans ce chaos. La personnalité d'Anatoli intrigue, mais peu à peu, on découvre son passé, et on comprend ! La rencontre de Schmid et de son dirigeable offrira un court répit et un espoir au trio. Et comme parallèlement Kid Toussaint met en scène les principaux acteurs historiques de ces événements, on ressent toute la démesure entre les décisions des généraux et la destinée de quelques individus.

Stéphane Perger porte en images cette lutte pour la survie de manière particulièrement impressionnante. Ses personnages sont terriblement expressifs et son travail en couleurs directes, dans les lumières du brasier, offre à certaines images une dimension quasi fantastique. L'atmosphère générale du récit, fort bien rendue, est oppressante. Quand on referme l' album -enrichi d'un beau cahier graphique- c'est avec l'envie de prendre un bon bol d'air, et de réfléchir, peut-être, aux conséquences de certains choix. L'incendie de Moscou ayant, en quelque sorte, été pour la Grande Armée de Napoléon le point de départ de la désastreuse retraite de Russie.