Pepe Carvalho

Tome 1 : Tatouage

Scénario : Hernan Migoya d'après E.V. Montalban
Dessins et couleurs : Bartolomé Segui

Dargaud

Eaux troubles

Le corps nu d'un homme est découvert un jour sur une plage des environs de Barcelone. L'homme est inidentifiable, les poissons ont dévoré son visage, l'unique indice est un tatouage sur la peau : Né pour révolutionner l'enfer . La phrase sonne comme un avertissement et Carvalho est chargé de découvrir l'identité de l'homme. Une enquête qui embarque le lecteur, des rues de Barcelone au quartier rouge d'Amsterdam, où le sens du message se dévoilera peu à peu.

Après une adaptation en téléfilms, c'est sous forme de BD que l'on retrouve Pepe Carvalho, le détective privé créé par l'écrivain Manuel Vazquez Montalban. Pour qui ne le connaît pas, le personnage est singulier. Macho, coureur de jupons (même s'il entretient une relation régulière avec...une prostituée) et surtout gourmet gourmand, Pepe Carvalho échappe à pas mal de clichés généralement associés aux "privés", peut-être pour mieux imposer les siens !

Tatouage nous propose une longue et lente enquête au sujet d'un noyé découvert sur une plage de Barcelone. L'histoire se situe au cours des années 70' alors que le tatouage, justement, faisait encore figure d'exception...et pouvait constituer un solide point de départ pour une enquête. Le rythme est nonchalant, et si le privé remonte la piste du tatoué dans un périple qui va le conduire dans différents coins d'Espagne mais aussi à Rotterdam et Amsterdam, il le fait au gré de nombreuses rencontres, parfois pittoresques, et de plus nombreux repas (il existe même un recueil des recettes de Pepe Carvalho...). On suit le héros dans ses recherches, ses pensées, et de multiples  disgressions qui nous éloignent parfois de l'enquête au sens strict du terme. Elles contribuent pourtant à esquisser les contours de l'une ou l'autre pièce du puzzle à assembler.

Plus que par l'action ou le suspense, Tatouage séduit par l'originalité de son personnage principal et par son atmosphère très particulière. Le dessinateur Bartolome Segui restitue fort bien cette dernière et nous replonge habilement dans les années 70',  sans que cet aspect prenne une dimension excessive. Certains événements précis ayant trait à l'histoire de l'Espagne à cette époque sont plutôt évoqués discrètement par des titres de journaux, et quelques points de repère cinématographiques jalonnent l'album. Un soin tout particulier est accordé aux décors des différents lieux traversés ou fréquentés par Pepe Carvalho.

On se plonge aisément et avec plaisir dans l'ambiance de Tatouage, et la rencontre avec son héros détective privé s'avère surprenante. Les chemins de traverse empruntés par sa pensée pour élucider la mort de Julio le tatoué appellent peut-être à une deuxième lecture, mais on n'y rechignera certainement pas. Un polar doux-amer à savourer...