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Les lumières de l'aérotrain, par Aurélien Ducoudray, Johann Corgié (Grand Angle)

Les lumières de l'aérotrain

Scénario : Aurélien Ducoudray
Dessins et couleurs : Johann Corgié

Grand Angle

Déraillement

Sur le côté droit de la ligne Paris-Toulouse, une structure en béton file sur une dizaine de kilomètres. Elle était destinée dans les années 1970 à accueillir l'aérotrain, projet avorté de train à grande vitesse. Sous un pilier de cette ruine moderne, Hervé, 17 ans, et Romuald, 12 ans, n'ont pas réussi à décoller, eux non plus. Lucie va apporter pas mal de nouveauté dans leur vie monotone. À 16 ans, avec un père conducteur de train au Japon et une mère richissime, elle a des arguments pour les séduire et leur faire tourner la tête… Mais Lucie ment beaucoup aussi…   

Malgré son titre, c'est une histoire bien noire que nous conte Aurélien Ducoudray dans Les lumières de l'aérotrain. En effet, si le début du récit peu sembler relativement innocent, avec son portrait de trois glandeurs/losers - et encore, on peut imaginer que le jeune Romuald a de mauvaises fréquentations - l'irruption de la jolie Lucie dans leur existence va progressivement amener celle-ci à prendre un dangereux virage. Fille de conducteur de train ? Fille de militaire ? On découvre peu à peu que certaines choses ne collent pas dans la présentation de celle-ci. Pourtant, brisant la monotonie de leur quotidien, elle parvient à séduire Hervé, Romuald et Mathilde, la caissière de supermarché presque aussi paumée que les deux gamins. Les trois compères ont un grand coeur, et Lucie l'a très bien compris. Mais s'appelle-t'elle seulement Lucie ?

Aurélien Ducoudray met tout ce petit monde en scène avec réalisme et sensibilité, offrant à son scénario un décor étonnant avec ces vestiges de la ligne désaffectée de l'aérotrain. Un choix qui nourrit aussi un de ses personnages, Romuald, passionné de chemins de fer, et fasciné par ce projet (authentique) précurseur du TGV. La passion de Romuald introduit par ailleurs quelques traits d'humours bienvenus dans une histoire qui glisse inéluctablement vers la tragédie.

Johann Corgié, jusque-là coloriste, signe ici son premier album en tant que dessinateur et s'en tire avec les honneurs. Son trait semi-réaliste, à mi-chemin de l'école de Marcinelle et des mangas, offre aux différents personnages des physionomies en phase avec leurs personnalités. Son dessin est vivant, dynamique, et nombre de cases comprennent un détail qui fait vrai. Ses couleurs, faut-il le préciser, renforcent avec talent les différentes ambiances qui rythment l'album jusqu'à son amère conclusion.

Les lumières de l'aérotrain ont aussi leur part d'ombre...

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Pierre Burssens

Du même scénariste :

Les chiens de Pripyat - T1: Saint Christophe, par , Christophe Alliel Bob Morane Renaissance - T2: Le village qui n'existait pas, par , Dimitri Armand , par ,  - T1: , par , Jeff Pourquie

Aussi sur le site :

Pour en savoir plus : Le site de Johann Corgié

28/06/2018