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Mata Hari, par Esther Gil, Laurent Paturaud (Daniel Maghen)

Mata Hari

Scénario : Esther Gil
Dessins et couleurs : Laurent Paturaud

Daniel Maghen

L'oeil du jour

Octobre 1917, en pleine Première Guerre Mondiale. Mata Hari, convaincue d’intelligence avec l’Allemagne, est condamnée à mort par l’armée française. Mata Hari a-t-elle vraiment été un agent double ou a-t-elle servi de bouc émissaire aux services secrets français ?

Après un album consacré à Victor Hugo chez le même éditeur en 2013, c'est à un personnage aussi mythique que sulfureux que s'intéressent Laurent Paturaud et Esther Gil. Mata Hari, née Marghareta Zelle, continue à fasciner plus de cent ans après son exécution, à tel point que depuis 1920, un livre au moins lui est consacré chaque année. Dans cette continuation, c'est un fort bel album de BD qu'il nous est donné de découvrir en 2019.

Très documenté tant au niveau scénaristique que graphique, ce Mata Hari s'attache, au-delà du mythe, à une approche humaine du personnage. Esther Gil resitue ainsi le parcours de la modeste jeune femme hollandaise épouse d'un officier et son installation à Java où elle va découvrir la violence comme les danses traditionnelles. Ces dernières lui serviront, après sa séparation, menant une vie de cocotte, à côtoyer la haute société parisienne alors que les prémices de la première guerre mondiale s'installent peu à peu... Un jeu dangereux, dont elle ne semble pas avoir totalement mesuré les risques, sera le prétexte à sa condamnation...

Coupable ou victime ? Sans se prononcer totalement, le scénario d'Esther Gil fait peser la réponse du côté du second plateau de la balance, alors que l'intéressant dossier qui complète l'album, à la fois cahier graphique et documentaire, nous apprend qu'en 2001 (!) la fondation hollandaise Mata Hari à Leuwarden, lieu de naissance de la danseuse, avait introduit une requête en révision de sa condamnation. Demande rejetée par l'Etat français...

Laurent Paturaud signe lui, graphiquement, un album somptueux. La belle héroïne n'en est pas le moindre atout de séduction, mais le soin apporté aux décors, aux multiples détails, aux styles décoratifs de l'époque (comme cette illustration de couverture qui évoque les créations d'Alfons Mucha) offrent quant à eux un écrin de choix à ses danses et à son histoire. La même délicatesse se traduit dans la palette des couleurs et son utilisation pleine de finesse.

Des planches sur lesquelles on s'attardera donc avec plaisir après une première lecture et qui, malgré tout, ont le mérite de conserver un peu du voile de mystère qui enveloppe Mata Hari. Celui-ci n'est-il, finalement, pas aussi fascinant que le personnage auquel il est attaché ?

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Pierre Burssens

Pour en savoir plus : Le site de Laurent Paturaud

30/09/2019