Solo
Scénario, dessins et couleurs : Gilles Rochier
Casterman
Sonnerie aux morts
Après les attentats, il se procure un bugle. L’instrument devient alors son unique moyen d’expression. Il souffle sans vraiment jouer, il ne fait pas de la musique mais plutôt des sons qui agacent, questionnent son entourage, à commencer par Kader, son ami de toujours…
Cet album de gilles Rochier a été publié le 11 septembre, date anniversaire de l'attaque du World Trade Center, mais traite, indirectement, d'autres attentats -ceux de Paris- et de leurs conséquences sur le personnage principal.
On ne connaît pas son nom, on sait juste qu'il est marié, père de famille, qu'il vit dans une cité et que son meilleur ami/complice est Kader. Après les attentats de Paris, il a choisi de se taire, plus précisément de ne plus parler mais de s'exprimer autrement, en soufflant dans son instrument. Choix délibéré ? Traumatisme dû aux attentats ? L'auteur ne répond pas clairement à cette question, mais propose plutôt, par l'entremise de Kader, d'explorer des pistes, des possibilités d'explication.
Parallèlement à cet aspect, l'incessant Pouet-Pouet produit par le personnage principal et son instrument a des conséquences sur ses proches et...le voisinage. Même Kader, pourtant décidé à comprendre et aider son ami, se retrouve à bout de nerfs.
Gilles Rochier signe à nouveau une histoire intimiste pour le moins originale. Après l'errance de Tonio et son pote dans En roue libre, il nous livre les questionnements de Kader quant à l'état du personnage principal et en tire un opus de plus de 80 pages. Le récit déconcerte et le lecteur se retrouve plus ou moins dans la même position que Kader. On partage ainsi le tragique, l'humour, les interrogations, la poésie et l'agacement provoqués en alternance par ce surprenant Solo.
Un Solo qui, comme en musique, peut s'avérer enrichissant dans un morceau mais ne doit pas devenir trop long. Une lecture étonnante, en tous cas !