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Léopoldville 60, par Patrick Weber, Baudouin Deville (Anspach)

Léopoldville 60

Scénario : Patrick Weber
Dessins : Baudouin Deville
Couleurs : Bérengère Marquebreucq

Anspach

Congo moderne

Léopoldville, 1960. Alors que s’ouvre la Table ronde qui va décider du futur du Congo, la capitale de la colonie belge retient son souffle. Après ses débuts d’hôtesse à l’Expo 58, Kathleen est engagée au sein de la prestigieuse compagnie aérienne Sabena. Elle découvre l’Afrique alors que certains sont prêts à tout pour défendre leurs intérêts. Quitte à mettre le feu aux poudres.

L'an dernier -et dans le contexte des 60 ans de l'Exposition universelle de Bruxelles- Sourire 58 des mêmes auteurs avait constitué une belle surprise, tant pour les lecteurs que pour les jeunes éditions Anspach auxquelles l'album avait permis une enviable entrée sur la scène BD. L'idée de donner une suite aux aventures de Kathleen n'avait pas tardé à s'imposer et on découvre aujourd'hui Léopoldville 60 avec plaisir et curiosité. L'Expo 58 a marqué durablement la mémoire des belges, et c'est à travers d'autres symboles et événements tout aussi marquants que l'on retrouve l'héroïne créée par Patrick Weber et Baudouin Devill

En effet, Kathleen est devenue hôtesse de l'air à la Sabena, (aujourd'hui défunte) compagnie aérienne belge et se retrouve plongée, bien malgré elle, au coeur des troubles précédant l'indépendance du Congo, alors colonie de la Belgique. Au départ de l'amitié de Kathleen et Monique, Patrick Weber imagine une aventure aux allures de polar et qui flirte, vers la fin, avec l'espionnage. Le tout s'insère précisément parmi des faits historiques, quasi à la veille de l'ultime visite du roi des Belges à sa colonie et à l'avant-veille de l'indépendance du pays.

Le récit permet à l'auteur d'évoquer un enjeu souvent passé sous silence, volontairement ou non, de cette période troublée, et de rappeler le rôle de la Sabena qui, en organisant un véritable pont aérien, permit le rapatriement de 35 000 réfugiés belges dans les trois semaines qui suivirent la déclaration d'indépendance du Congo.

Colons plus ou moins modérés, militants africains, personnages ambigüs et...une vieille connaissance policière présente... par hasard (!) croisent la route de Kathleen qui guide le lecteur dans une visite documentée de Léopoldville précisément restituée. L'intrigue est prenante, mais on prend aussi un réel plaisir à parcourir et à s'attarder sur ces images d'hier soigneusement recréées par Baudouin Deville. Le trait du dessinateur, largement influencé par la ligne claire, convient tout particulièrement à ce type d'histoire. Il renforce encore son identité et souligne son inspiration belgo-belge. Quelques clins d'oeil discrets, graphiques ou scénaristiques, font d'ailleurs référence à certains classiques du 9e Art.

De classique, Léopoldville 60 en a l'allure, mais le dynamisme du scénario et l'angle d'approche des faits authentiques au sein desquels il prend place sont très actuels, à l'image des couleurs de Bérengère Marquebreucq enrichies de touches d'une belle délicatesse. Léopoldville 60, plus abouti encore que son prédécesseur devrait au moins remporter les mêmes suffrages tandis qu'un prochain épisode de cette série devrait nous projeter -et c'est pour le moins inattendu- en...1943 !

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Pierre Burssens
06/11/2019