Auracan » chroniques » Fourmies la Rouge
Fourmies la Rouge, par Alex W. Inker (Sarbacane)

Fourmies la Rouge

Scénario, dessins et couleurs : Alex W. Inker

Sarbacane

La couleur du drame

Nous sommes en 1891 à l’heure où l’industrialisation bat son plein et Fourmies, petite cité du Nord spécialisée dans le textile, emploie une cohorte d’ouvrières et d’ouvriers. Enfin, quand on dit employer, on devrait plutôt dire exploiter tellement les conditions de travail y sont inhumaines, sans parler des horaires de douze à dix-sept heures par jour, une des principales revendications de la classe ouvrière. Et aujourd’hui tombe le 1er mai, le jour de manifestation initié deux ans plus tôt aux Etats-Unis.

Ainsi ce matin Louise, la jeune ouvrière gouailleuse et au verbe haut, est bien décidée à braver les interdits en allant manifester alors que bon nombre d’ouvriers soumis à la dictature du patronat ont franchi les portes de la filature de laine pour leur journée de labeur. Et elle n’est pas la seule à se préparer à défiler et à revendiquer la journée de 8 heures : que ce soient Maria la jeune et belle ouvrière rousse, Kléber, Emile, tous unis !

Seulement, les propriétaires sentent la colère gronder depuis quelques semaines, et l’affolement les gagne. Ils vont intimer au maire de Fourmies de faire lever l’armée par le préfet pour disperser les manifestants… et survient le drame !

L’auteur Alex W. Inker retrace avec sensibilité cette journée mémorable de la ville où il a vécu enfant, avec le souvenir de ce moment sanglant, à jamais gravé dans la cité jusqu’à en avoir rajouté la Rouge  à son nom, afin que perdure la mémoire.

Commémorant à sa manière les 130 ans de l’incompréhensible massacre ordonné par un officier à des soldats que la population adule, l’auteur ajoute une belle pierre à l’édifice en narrant en images une période trouble, où notamment les affres du chômage étaient déjà présents dans une région tant marquée depuis par le fléau.

D’Apache à Fourmies la Rouge en passant par Servir le Peuple, le dessinateur Alex W. Inker, fer de lance des éditions Sarbacane, n’a de cesse de renouveler et d’adapter son graphisme à son récit et ce, pour le plus grand bonheur du lecteur. Au dessin plus épuré que dans ses précédents albums s’ajoute cette fois une bichromie rouge et noire qui renforce un récit fort.

Partager sur FacebookPartager
Bernard Launois

Du même dessinateur :

Servir le peuple, par Yan Lianke, Alex W. Inker
18/05/2021