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La mémoire dans les poches - Tome 1 : Première partie, par Luc Brunschwig, Étienne Le Roux (Futuropolis)

La mémoire dans les poches

Tome 1 : Première partie

Scénario : Luc Brunschwig
Dessins et couleurs : Étienne Le Roux

Futuropolis

Futuropolis sait mettre en valeurs l’œuvre de ses auteurs et dessinateurs à travers l’élaboration de l’objet-livre comme le démontre notamment La mémoire dans les poches d’Étienne Le Roux et Luc Brunschwig. Du choix de la couverture à celui du papier, tout participe à proposer un décor intimiste et mélancolique pour cette fiction subtile et humaniste dont on découvre ici la première partie.

La couverture forme à elle seule un véritable incipit. Une rue déserte bordée de voitures stationnées traverse une cité d’HLM. Il pleut. Quelques halots de lampadaires balisent le chemin d’un homme un peu voûté et de son chien. Un léger vent balaye le triste imperméable de l’homme à la casquette que l’on découvre de dos. Part-il ou revient-il ? Et puis il y a le titre qui s’étale sur la route comme une légende pour ce vieux bonhomme aux mains vissées à ses poches. Peut-être y cache t-il un peu de sa mémoire, les doigts serrés sur quelque objet coincé dans l’écrin du tissu, comme les fétiches d’un passé dont il est nostalgique ? Ou s’agit-il d’une mémoire plus honteuse, mise en pénitence dans ses poches, petits mitards étanches, noirs et muets sur lesquels on pose les doigts comme sur une bouche cousue.

La couverture est nimbée d’une tonalité verte comme l’est encore la mémoire de Sidoine Letignal. Car c’est de ce vieux monsieur que dépend toute l’histoire. Un bébé braillard en bandoulière, on le découvre à la recherche désespérée de lait nourricier. Il trouve refuge dans un petit café de quartier mais se trouve alors contraint de lever le voile sur son drame et son histoire familiale. Mais la sépia d’un passé jauni par la persécution des juifs vient teinter ponctuellement les pages, comme la promesse d’une histoire à tiroirs où le tabou et le mensonge ont la part belle.

La mémoire dans les poches est subtilement construit, et même s’il est loin du genre, installe un suspense du quotidien comme une énigme policière qui met le lecteur en haleine au fil des planches. Ce scénario de Luc Brunschwig, construit autour de la déliquescence d’une harmonie familiale apparente, ne saurait trouver meilleurs dessins et couleurs que ceux d’Étienne Le Roux.

Un récit en deux parties qui restera dans la mémoire de ses lecteurs.

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Cécile Peltier
18/06/2006