Buckson
Scénario et dessins : Victor Araque Marcos
Couleurs : Victor Araque Marcos & Rocio Estera Corredera
EP , collection Roman Graphique
Anesthésie mutagénique
Dans un futur proche, Yannick est un "anesthésiste mutagénique" en chômage. Il utilise pour son travail un Buckson, une créature dérivée des tiques conçue en laboratoire afin d'en faire un outil médical spécialisé. L'élevage des Buckson est officiellement icontrôlé par l’État. Quand un ancien professeur lui offre l’opportunité de gagner beaucoup d’argent, le jeune anesthésiste accepte, malgré ses soupçons. Il se retrouve alors dans une clinique clandestine pour soigner des membres de la Mafia. Bientôt, il se rend compte qu’il a pris la pire décision de sa vie.
Drôle de cocktail que ce Buckson. Malgré un contexte de légère anticipation et l'intégration d'éléments proches de l'horrifique, Victor Araque Marcos signe un récit d'une centaine de page s'apparentant davantage au roman noir. En effet, le Buckson qui donne son nom au titre, bestiole utile mais répugnante dont les origines sont exposées en pages de garde, n'a, finalement, qu'un rôle très secondaire dans l'histoire. Une fois intégré à cette clinique clandestine, Yannick, anti-héros s'il en est, va surtout devoir composer avec les menaces et tensions générées par les truands qui l'emploient. D'autant que, bien malgré lui, il a déclenché une guerre de succession pour prendre la tête de l'organisation.
Si des références cinématographiques devaient s'appliquer à cet album initialement publié en Espagne par Grafito Editorial, on oscillerait entre David Cronenberg et Quentin Tarantino. Le premier pour l'élément fantastique induit par l'étrange créature et deux séquences oniriques la mettant en scène avec son utilisateur. Le second pour la violence exacerbée omniprésente au cours de l'histoire. En effet, ça bastonne et flingue à tout va, dans de généreuses gerbes de sang.
Le dessin semi-réaliste de l'auteur est parfois hésitant mais restitue cependant fort bien l'ambiance glauque de la descente aux enfers de son anesthésiste paumé. Le découpage est efficace, et seule une longue et bavarde séquence de négociations entre mafieux vient en casser quelque peu le rythme. Qu'importe, elle se conclura par un massacre ! Les physionomies parfois surprenantes de certains protagonistes ajoutent à l'étrangeté de ce Buckson, quant à ces créatures, justement, la colorisation achève de les rendre hideuses à souhait.
Tordu, décalé, mais sortant assurément des sentiers battus, Buckson s'adressera prioritairement aux amateurs des références précitées. Ames (et estomacs) sensibles s'abstenir...