Choc
Tome 3/3 : Les fantômes de Knightgrave
Scénario : Stéphane Colman
Dessins : Eric Maltaite
Couleurs : Cerise et Eric Maltaite
Dupuis
L'itinéraire d'un enfant gâché
Tel est le sous-titre que l'on pourrait trouver à ce triptyque Les Fantômes de Knightgrave consacré au passé de Monsieur Choc, le redoutable vilain créé par Rosy et Will. Que sait-on de l'un des plus fameux et des plus terribles méchants de la bande dessinée franco-belge ? Quels événements le conduisirent à fonder le gang de la Main blanche, à se coiffer de cet imprenable heaume, à régner sans partage sur le monde de la criminalité ? La saga Choc traverse les âges, d'une guerre mondiale à l'autre, et parcourt cinq décennies majeures du XXe siècle afin de retracer une tragique existence : celle d'un homme qui se déshumanise.
Dès son annonce, une série consacrée à Choc, l'un des "méchants" emblématiques de la BD franco-belge faisait figure d'événement. Un engouement qui s'est révélé justifié dès la sortie du tome 1, rapidement couronné de prix prestigieux. Stéphane Colman et Eric Maltaite ont, en effet, donné un visage à Choc. Sous le célèbre casque, ils nous ont fait découvrir un gamin, puis un homme blessé à de multiples reprises par la vie qui l'a peu à peu modelé en criminel.
Ce tome 3 marque donc la fin (toute provisoire) de son itinéraire personnel, avant qu'il n'apparaisse, comme on le connaît, dans les aventures de Tif et Tondu, animées par Will (Willy Maltaite) et Maurice Rosy. On y retrouve les qualités de ses deux prédécesseurs. Stéphane Colman a décliné en trois albums un riche roman graphique, précisément inscrit dans l'Histoire du XXe S., à l'approche nettement plus adulte que ce que l'on connaissait jusqu'ici de Monsieur Choc.
Roman noir, espionnage, polar...autant de (sous-)genres qui se rencontrent harmonieusement au cours des événements dévoilés qui, quelque part, construisent ce prince du crime. Dès l'ouverture de l'album, on est happé dans le récit et on comprend, d'un flash-back à l'autre, ce funeste enchaînement de circonstances. Une relecture attentive des deux premiers volets de la trilogie s'avèrera d'ailleurs fort utile pour en apprécier toutes les subtilités.
Eric Maltaite, de son côté, poursuit une participation graphique alliant un dynamisme très actuel à un certain classicisme. Techniquement, son travail sur les encrages est remarquable alors que l'action nous conduit dans des reconstitutions historiques tout aussi soignées que spectaculaires. Et malgré cela, les auteurs parviennent à ce qu'une note de mystère subsiste tout au long de ces 86 dernières planches ! A noter qu'il existe, chez le même éditeur, une somptueuse intégrale en noir et blanc (mais au tirage très limité) qui permet plus encore de mesurer tout le travail du dessinateur.
Ce tome 3 clôture ainsi en apothéose Les fantômes de Knightgrave, triptyque indispensable à tous les amateurs de BD franco-belge classique. Un hommage hors du commun sans cependant que n'émane de celui-ci la moindre poussière nostalgique !