Dans mon village, on mangeait des chats
Scénario : Philippe Pelaez
Dessins et couleurs : Francis Porcel
Grand Angle
Le Toulousain
Jacques et Lily surprennent Charon, le boucher-maire, dans le bois en train de capturer des chats, matière première de ses fameux pâtés que tout le monde s’arrache. Lorsque Charon s’aperçoit que sa recette est éventée, il décide tout simplement d’éliminer les enfants qui pourraient trahir son secret. Jacques se défend et tue le boucher. En rentrant chez lui, le garçon s’interpose entre son père ivre et sa petite sœur et tue le tyran. Devenu meurtrier pour sa survie, et parricide par accident, Jacques est envoyé cinq ans en institut d’éducation surveillé pour en sortir chef de bande.
Du jeu dangereux au chantage, il n'y a qu'un petit pas que franchit un jour Jacques, gamin révolté. Mais quand ce pas, indirectement, se solde par deux cadavres, c'est tout l'avenir de Jacques qui se voit prendre une funeste tournure. Passage par une ISES (Insititution spécialisée d'éducation surveillée) où son palmarès lui ouvre le statut de chef de bande, combines de plue en plus audacieuses pour finalement basculer dans le crime organisé, dans l'ombre d'un gang marseillais.
Philippe Pelaez situe son histoire dans les années 70' et nous rappelle à la fois la grande époque des films policiers français et l'itinéraire bien réel de certains truands. Son récit est bien construit et on n'imagine pas, au premier abord, où cette étonnante histoire de chats va conduire Jacques. Le scénariste prend le temps de nous décrire cette progressive ascension dans le milieu, conduite par le dangereux opportunisme du personnage principal. Pour mieux nous la faire partager, c'est Jacques qui nous la raconte à la première personne via de nombreux textes narratifs.
L'auteur nous accroche dès les premières planches et son (anti)héros qui aurait pu se faire appeler Le Toulousain. Belle idée que la présence du laboratoire de Charon sur une île, le boucher-maire assurant symboliquement le rôle de son homonyme, sinistre passeur de la mythologie grecque, et conduisant Jacques, à son insu, vers d'autres formes des Enfers, ceux de la délinquance puis du crime...
Francis Porcel adapte son dessin à la rudesse de l'histoire et confère notamment à Jacques, surtout dans les premières séquences, des expressions et un regard inquiétants. Pour le reste, l'efficacité est prioritaire et il n'en faut pas plus pour servir un album qui se lit comme un roman noir, évoquant parfois Daeninckx, parfois Vautrin... Les amateurs apprécieront.