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Jeanne de la Zone, de Frédérique Jacquet et Étienne Davodeau

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Jeanne de la Zone © Davodeau - Jacquet / L'Atelier
Interrogée par Auracan.com, Frédérique Jacquet raconte l’objet de son livre Jeanne de la Zone, publié aux éditions de l’Atelier, et pour lequel Étienne Davodeau a réalisé de très belles illustrations. Un travail qui fait écho aux thématiques chères au dessinateur des Mauvaises Gens. Un outil pour donner la réalité d’aujourd’hui en débat...

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Frédérique Jacquet
© Sophie Vivier
Qu’est-ce que la Zone ? D’où vient ce nom ? Que recouvrait-il à l’origine ? Quel regard pouvons-nous porter sur cette histoire aujourd’hui ? Quelques années après son Douce Banlieue aux éditions de l’Atelier, Frédérique Jacquet explore cette thématique avec Jeanne de la Zone, en compagnie d’Étienne Davodeau au dessin.

Jeanne est née de l’autre côté des Fortifs, à Paris, dans ce qui était un no man’s land entre la capitale et les villages alentours, le début de la banlieue, au début du XXe siècle. Frédérique Jacquet, archiviste travaillant à la mairie de Saint-Denis, raconte la vie de cette jeune fille, sans fioritures : « J’aime aborder l’histoire en dehors des grands événements historiques. Ici, cela se passe juste au-delà des fortifications, dans l’ancienne Zone militaire non constructible, servant à la défense de la capitale. » Le sujet est très bien documenté, clair, y affleurent la difficulté de vivre de cette communauté, mais aussi sa cohésion, sa solidarité, sans pour autant tomber dans quelque pathos malsain.

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Jeanne de la Zone, extrait
© Davodeau - Jacquet / L'Atelier
L’auteure parle « de joies simples, de ces petits riens qui rendaient la vie belle », des angoisses et des inquiétudes aussi, qui renvoient au vécu des générations plus âgées, de nos parents aujourd’hui septuagénaires.

Précision importante, « le personnage de Jeanne est une invention », mais Frédérique Jacquet, qui s’est, entre autres, spécialisée sur l’histoire des périphéries urbaines et de la banlieue parisienne, s’est basée, « pour élaborer ce personnage, sur des témoignages oraux, sur des livres, mais aussi avec mes rencontres d’ados en tête, pour coller au plus près de cette réalité méconnue. En ce sens, Jeanne a réellement existé, c’est un personnage qui incarne l’héritage d’une vie dans un endroit peu connu. »

L’idée est de montrer « la richesse de la vie intérieure des gens, leur quotidien, pour ouvrir un dialogue sur notre héritage, sans forcément savoir que l’on en hérite. J’essaie d’aborder les choses sous un angle "anthropologique", les manières de vivre, d’être ensemble, de montrer une communauté qui fait société ».


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Jeanne de la Zone, extrait
© Davodeau - Jacquet / L'Atelier
Frédérique Jacquet insiste aussi sur le côté non linéaire de son récit : « Je voulais montrer des séquences fortes qui vont forger la vie de Jeanne ensuite. C’est une vision intime et vivante, l’espace du souvenir de Jeanne, ce qui restera ensuite de l’enfance. C’est en quelque sorte la vie intérieure d’une petite fille, et le regard qu’elle porte sur la société qui vit autour d’elle et la marque. »

L’espace dans lequel vit Jeanne a aussi profondément marqué l’inconscient collectif : « Les bicoques – parce que ce sont bien des bicoques, bien entretenues, et non un bidonville – ont marqué la banlieue, même s’il n’en reste rien aujourd’hui, si ce n’est le périph. Dans ce livre, il n’y a pas de leçon, pas de démonstratif, juste des éléments pour donner la réalité d’aujourd’hui en débat. »

Loin de se limiter aux ados, comme la couverture le laisse supposer, Jeanne de la Zone se conçoit, selon Frédérique Jacquet, « comme un livre de partage, pour ouvrir le dialogue, pour réfléchir sur ce dont on hérite sans savoir que l’on en hérite »… D’autant qu’une partie de l’ouvrage est consacrée à des définitions et repères, très utiles.

Un livre pour tous, donc.

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Mickael du Gouret

Jeanne de la Zone est le premier livre de la collection L’Histoire sensible. Frédérique Jacquet, directrice de la collection, et Étienne Davodeau seront les auteurs du prochain opus, qui parlera d’un garçon à Saint-Nazaire dans les années 1960.

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01/11/2008 - source : auracan.com