Auracan » Indiscretions » L’expo Toppi fait le plein

L’expo Toppi fait le plein


Mme Toppi, Daniel Maghen, Sergio Toppi et Michel Jans

Daniel Maghen, qui certes le pressentait, ne cachait pas sa satisfaction vendredi 14 septembre : le vernissage de l’exposition-vente de dessins et de planches de l’auteur BD milanais Sergio Toppi dans sa galerie, quai des Grands Augustins, a été un franc succès. Non seulement le galeriste a obtenu de pouvoir vendre des planches de l’artiste, une grande première puisqu’il s’agissait de la première vente officielle d’originaux, mais, de plus, le nombre total de dessins avait été fortement relevé par rapport aux prévisions : pas moins de 120 originaux, dont une quarantaine de planches.

Collectionneurs et amateurs ne s’y sont pas trompés : les visiteurs ont été nombreux, parmi lesquels Lorenzo Mattoti, Régis Penet, Andréï Arinouchkine, Thierry Ségur, Liberatore, Jacques Ferrandez, Andréaé, et même le patron de Leclerc et grand passionné de BD Michel-Édouard Leclerc… D’autre part, les deux tiers des œuvres ont déjà été vendues à l’heure où Auracan.com met cet article en ligne, dont une bonne partie avant même le vernissage – il était possible de se porter acquéreur directement sur le site internet de la galerie. Les emplettes se sont donc déroulées à bon train… ce que l’on peut largement comprendre, au vu de ces très beaux dessins, émouvants, forts, dérangeants, exprimant la violence comme l’émotion par une densité plus ou moins forte de traits. Au-delà même de l’émotion, une musicalité bien particulière, qui tient à sa manière de rythmer son récit, d’accentuer un personnage, de créer une atmosphère. Dans Blues, par exemple, l’on imagine parfaitement les notes aériennes du saxo, le tempo grave et rugueux du tambour, le chant du grillon.


Sergio Toppi

Un long cheminement

Sergio Toppi étant à Paris pour ce vernissage, Auracan.com en a profité pour le rencontrer le lendemain, juste avant la séance de dédicaces. Ce petit (par la taille) monsieur, souriant et distingué, a expliqué sa vision de la BD et son travail : « C’est vrai, j’ai une façon particulière de dessiner. Mais ce n’est pas venu du jour au lendemain, il m’a fallu un long cheminement. Et peu importe qu’on juge mon dessin positif ou négatif, les amateurs de ligne claire par exemple ne doivent pas y être sensibles, je dessine d’une façon très personnelle, et mon trait est bien reconnaissable. »
Quant à son parcours, « si faire de la BD est un choix, je veux aussi aller dans des directions différentes, chercher des univers sans cesse différents. Bien sûr, quand j’ai des commandes, je n’ai pas une entière liberté. Mais dès que je suis libre, j’essaie d’ajouter une note magique, ce qu’en Italie on appelle le “réalisme magique”, une touche inquiétante. Dans Black & Tans, par exemple, les deux soldats anglais, lorsqu’ils pénètrent dans la tour en pensant y trouver un dépôt d’armes des rebelles irlandais, entrent dans une distorsion de la réalité, de la vérité. On comprend qu’ils meurent par le filet de sang, c’est tout. Et la petite fille, qui devrait apparaître comme “victime” devient la voix de la justice. » La même chose peut s’appliquer à l’album Blues, déclencheur de la présente exposition : « C’est le même va-et-vient entre réalité et imaginaire. Tout est normal en apparence, mais la photo se met à vivre. »
Tout comme Michel Jans, éditeur de Mosquito, Sergio Toppi apprécie ce retour à Paris, une « forme de nouvelle jeunesse » : « Pendant un certain temps, il y a un peu un passage en retrait. Ça a aussi été le cas en Italie, mais les choses évoluent. » Et de faire un parallèle assez intéressant : « Il n’y a pas de BD populaire ou élitiste, c’est de la bande dessinée. Comme l’opéra, la BD est un moyen d’expression, même si ces formes d’expression ne touchent pas le même public. »

Un nouvel album déjà bien engagé

La suite de la collaboration avec Mosquito devrait avancer plus vite que prévu, et dans une direction légèrement différente de l’idée initiale. « J’avais prévu une commande d’une histoire japonaise pour boucler un album sur ce thème, développe Michel Jans. Mais cet été, quand je suis allé voir Sergio, je me suis rendu compte qu’il avait déjà quatre histoires. Sergio a juste préparé une couverture et une 4e de couv’. La thématique de l’album, qui a une suite et un ordonnancement logiques, est la suivante : la première histoire traite de la vie d’une poétesse du XIe siècle, et la quatrième et dernière met en scène un ronin, et se terminera par un lien avec Hiroshima, toutes les deux s’inscrivant aussi dans la réalité magique. Les histoires 2 et 3 seront plus normales. » Michel Jans précise : « Mais ce sont toujours des récits un peu mythifiés, avec une fin un peu comme une morale, comme dans un conte. » Parce que « Sergio a toujours de la sympathie pour les plus faibles, pour les peuples opprimés ». Et ce dernier d’ajouter, un sourire aux lèvres : « Dans mes histoires, le seul personnage fort qui gagne toujours est le Collectionneur. Mais il est antipathique. »

Partager sur FacebookPartager
Mickael du Gouret

Photos © Manuel F. Picaud / Auracan.com

A lire aussi : Mosquito fête 10 ans d'édition de Sergio Toppi

 

24/09/2007 - source : auracan.com