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Nicolas Fructus publie son premier album de bande
dessinée : Le
fou sans nom, premier tome d'une saga futuriste
prévue en cinq volumes. L'univers de Thorinth,
une tour peuplée de fous et d'étranges petites
créatures, n'appartient qu'à l'auteur. Ce
premier tome est l'occasion de découvrir le style
très original de Fructus, un illustrateur qui nous
vient du milieu des jeux vidéos et du dessin animé.
Explications
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Nicolas Fructus, vous publiez votre première bande
dessinée, Thorinth. Quel a été
votre parcours avant cet album ?
J'ai travaillé pendant dix ans dans différents domaines.
J'ai une formation dans l'illustration traditionnelle qui m'a
amené par accident au dessin animé. J'ai également
fait des jeux vidéos, et de la publicité pour vivre.
Aujourd'hui, j'ai arrêté toutes les autres activités
pour me consacrer à la bande dessinée.
Hasard ou envie ?
La bande dessinée était une envie depuis très
longtemps. J'avais déjà développé
un projet avec un ami, mais puisqu'il vit actuellement en Australie,
cela a avorté. Puis j'ai commencé à travailler
sur Thorinth qui, à l'origine, était un projet
de dessin animé. Thorinth a très vite
dérivé vers la bande dessinée parce que mon
propos devenait trop adulte. La bande dessinée s'est révélée
être le meilleur support.
Evoquons Thorinth. Comment présenter cette
série ?
Il s'agit d'un univers fantastique. Ce n'est ni de la science-fiction,
ni de l'héroïc-fantasy à proprement parler.
C'est une sorte de monde hybride qui, je l'espère, a sa
logique interne. Thorinth fait partie de ces univers fantastiques
qui n'ont d'autres explications qu'eux-mêmes. C'est difficile
à cerner puisqu'on a tendance à catégoriser
les choses, on cherche toujours à mettre une étiquette.
On peut dire que Thorinth est une sorte de SF en huis clos.
Thorinth est le titre de votre série, mais c'est
aussi le nom d'un lieu
En effet, on est dans une tour-labyrinthe dont les habitants sont
complètements coupés d'un monde très technologique
qui lui relève de la science-fiction pure. Sur cette planète
existe une tour à l'intérieur de laquelle sont des
fous. J'ai cherché à imaginer un monde en vase clos
où vivent 300.000 personnes.
Et comment ces personnes arrivent-elles dans cette tour
?
Thorinth est une immersion dans un monde
Amodef,
une sorte de grand psychiatre, décide de réaliser
une étude approfondie de toutes les folies existantes.
Pour ce faire, il fait construire une tour pour y enfermer des
fous et les étudier. Mais l'architecte, Esiath, qui a été
chargé de construire cette tour, prend le pouvoir afin
d'utiliser Thorinth à ses propres fins.
Elle crée ainsi une sorte de golem
Oui, c'est son arme. Elle le crée de façon à
ce que la tour passe sous son contrôle et subisse son organisation.
Le seul hic, c'est qu'elle est tuée par l'arme qu'elle
vient de générer. Toute l'histoire démarre
là-dessus. Il s'agit du mythe fondateur de la tour. Ensuite
débute l'histoire du héros dont l'argument est très
simple : cet homme décide d'aller chercher sa femme emprisonnée
dans Thorinth. En effet, on a tendance à enfermer dans
cette tour des gens qu'on a envie de voir disparaître.
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Cette tour est également peuplée d'étonnants
petits animaux
Les Schnoubouf. (Rires). Précisons que, d'un côté,
on a le "Garde-fous", le golem créé par
cette architecte pour prendre possession de la tour, et de l'autre
les Schnoubouf. Pour l'anecdote, c'est un jeu d'esprit : Schnoubouf
est invariable. Le Garde-fous, lui, est pluriel. Les premiers
sont singuliers par leur multiplicité, alors que le second
est la synthèse de consciences plurielles. Aux yeux d'Esiath,
l'architecte, ces animaux sont une erreur de création.
Le bloc d'argile, à partir duquel fut créé
le "Garde-fous", a été scindé en
des milliers de petits éléments qui se sont transformés
en d'autres petits golems sous la forme des Schnouboufs. Non voulus
par Esiath, ce sont des créatures indépendantes
et immortelles, des sortes de guides au sein de la tour. Les Schnouboufs
vivent de la curiosité des gens qu'ils rencontrent. Ils
permettent de se repérer dans Thorinth, de comprendre les
us et coutumes de la tour.
Comment réalisez-vous les planches de Thorinth ?
Je travaille tout sur ordinateur, exceptée la couverture
que j'ai réalisée à l'huile puis retravaillée
à l'informatique. Je n'encre pas mes dessins. Je mets au
propre au crayon à papier les esquisses. Puis je les scanne.
Ensuite, j'intercale des calques pour la couleur que je réalise
en deux niveaux. Il y a une couche de couleurs sous le trait de
façon à asseoir les couleurs principales et les
ambiances, et ensuite, je travaille avec un calque supérieur
qui permet de revenir sur le trait, de le modeler, de le modifier,
d'installer les lumières fortes.
Les planches n'existent donc pas
Elles existent en tant que crayonnés, planche par planche.
Entre le dessin initial et le rendu final, beaucoup de modifications
sont réalisées à l'ordinateur. D'une certaine
manière, l'original est informatique.
Que vous a apporté votre expérience dans
le jeu vidéo et le dessin animé ?
Renversons la question. La bande dessinée est le gros du
travail. La BD est probablement le seul domaine qui couvre tous
les domaines graphiques de production. Dans une bande dessinée,
il y a du scénario, du découpage, donc du story-board,
une mise en scène comme en illustration, une façon
de faire vivre les cases indépendamment les unes des autres,
une immersion dans un univers avec une charte graphique, une charte
des couleurs. La bande dessinée est un travail qui couvre
dix métiers. Si j'ai eu un avantage à travailler
dans différents domaines, c'est d'avoir eu la possibilité
de les travailler indépendamment à plein temps.
La bande dessinée me paraît être une synthèse
de tous ces aspects. Du moins, je l'espère (rires).
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Combien Thorinth connaîtra-t-il d'albums ?
L'histoire se déroulera sur cinq tomes. J'ai l'histoire
générale, avec ses rouages et ses clefs. Le prochain
sortira dans dix mois, et les autres chaque année. Je ne
veux pas faire attendre les lecteurs plus d'une année.
En bande dessinée, comme on fait ces dix métiers
en même temps, on met un an à faire un album. C'est
un peu le talon d'Achille de la bande dessinée
Que cherchez-vous à faire avec cette série
? Volonté de créer quelque chose de nouveau ou juste
de divertir vos lecteurs ?
J'essaie d'abord de réaliser un univers graphique
nouveau, qui n'existe pas. Je cherche à dessiner l'univers
graphique qui me hante. C'est aux lecteurs, ensuite, de dire si
cet univers existe ou pas. Les premiers retours que j'ai me montrent
que les lecteurs semblent intéressés par cet univers.
De plus, la bande dessinée n'a pas de limites : on peut
faire ce que l'on veut. C'est une grande liberté que je
voulais acquérir après avoir travaillé dans
des milieux de production bridés par des données
commerciales qui empêchent de tout dire ou tout montrer.
Au-delà, je ne sais pas : c'est le milieu de la BD que
me le fera découvrir.
On se retrouve dans deux-trois albums ?
Il n'y a pas de problème ! (rires)
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