Quand souffle le vent
Scénario : Laurent Galandon
Dessins et couleurs : Cyril Bonin
Dargaud, collection Long courrier
Kheshalya
La prestigieuse collection Long courrier de Dargaud, l’équivalent d’Aire Libre chez Dupuis ou du label Quadrants chez Soleil, accueille deux jeunes auteurs prometteurs : Laurent Galandon (l’Envolée sauvage, Gemelos) et Cyril Bonin (Fog et Quintett T1). Ils proposent un voyage intimiste et dérangeant au début du XXe siècle dans un bourg minier du Nord de la France confronté aux difficultés économiques et à la rencontre du monde tzigane.
Kheshalia est une gitane, une très belle jeune femme aux yeux ensorceleurs. Elle voyage avec ceux qu’on appelle les « Manouches ». Frappée d’une mystérieuse malédiction, il lui est interdit d’exercer sa spécialité de lire dans les lignes de la main. Sa caravane de roulottes débarque dans un village peuplé par ceux qu’elle appelle les « Gadjé ». Le village est en émoi.
D’une part, André Mortier exploite sans vergogne sa mine de charbon principale source de revenus des « gueules noires » qui menacent de faire grève. D’autre part, l’entrée dans la ville des gens du voyage rappelle de mauvais souvenirs… Seul Antoine, un jeune mineur épris de connaissances et de voyages, voit un espoir dans cette rencontre. C’est sans compter sur le réveil de secrets bien enfouis…
Dans un contexte social tendu, cet album interpelle sur l’ouverture à l’autre, à la différence et au monde. Confrontation entre deux univers l’un sédentaire, étriqué, exploité, tourné vers les profondeurs, l’autre itinérant, curieux, libre et tourné vers l’horizon. Laurent Galandon fait réfléchir sur ces deux visions au travers de son couple improbable et de ce huis clos qui se déroule en quelques jours.
L’introduction d’un « brin de fantastique », comme le dit lui-même Laurent Galandon, permet habilement de relier le présent au lourd passé. Les textes sont fins et le scénario éloigné de simples clichés. L’histoire tragique se lit comme un thriller dont on est impatient de connaître le dénouement. Le dessin semi-réaliste de Cyril Bonin se coule parfaitement dans cet univers insolite. En choisissant une palette de couleurs sobre, il contribue à donner à l’ensemble une tonalité envoutante et franchement très réussie.
Une très belle histoire d’amour à méditer.