Shi
Tome 1 : Au commencement était la colère...
Scénario : Zidrou
Dessins et couleurs : José Homs
Dargaud
Le cri des femmes
Pour cacher un scandale qui pourrait nuire à la prestigieuse Exposition universelle, le cadavre d'un nourrisson est enterré dans les jardins du lieu qui accueille cet événement. Deux femmes, une noble anglaise et une Japonaise, la mère de l'enfant, partent en croisade contre l'Empire britannique pour élucider ce crime. Entre sociétés secrètes et manipulation, les deux jeunes femmes vont s'unir pour exposer la face cachée d'une machination infernale.
Qu'est-ce qui peut relier l'impunité d'un fabricant d'armes à l'issue d'un procès et un attentat commis dès sa rentrée à la maison, et des événements survenus à Londres en 1851 ? Ce premier tome d'un cycle prévu en 4 albums pose la question à défaut d'y répondre, et attise aisément la curiosité du lecteur. En effet, après une séquence d'ouverture...explosive, difficile de ne pas vouloir en savoir plus. Zidrou accroche notre attention en deux planches seulement, pour ne plus la lâcher ensuite. On effectue alors un bond dans le temps de plus d'un siècle, avant de revenir à l'époque contemporaine dans les toutes dernières pages de ce Au commencement, était la colère...
La colère, on l'imagine, est celle de Jennifer Winterfield, révoltée face à une famille aristocratique dont les tupitudes de la gent masculine n'ont pourtant rien à envier à ce qui se déroule, en certains lieux, dans les bas-fonds londoniens. La colère est aussi celle de l'étrange Kita, une jeune japonaise porteuse d'un impressionnant tatouage, "exposée" lors de l'exposition universelle, et dont le bébé, mort, n'a même pas pu être enterré décemment. Plus d'un siècle plus tard, l'attentat qui frappe le fabricant d'armes est revendiqué par une organisation composée uniquement de femmes...
Une nouvelle fois, Zidrou construit un scénario particulièrement prenant sur une intrigue prometteuse. Ce tome expose essentiellement le lien qui se crée entre Jennifer et Kita, et les causes de son développement. On ne s'y ennuie pas une seconde, et on se régale de quelques scènes d'anthologie, comme la poursuite des deux jeunes femmes en fiacre dans les rues, puis sur les toits de la capitale anglaise.
José Homs, dont on a pu apprécier la virtuosité du dessin dans un contexte contemporain dans Millenium et l'Angélus (collection Secrets - Dupuis) se surpasse dans ces scènes du XIXe S. Les planches somptueuses qu'il nous livre appellent la comparaison avec celles de Juan Luis Landa (Arthus Trivium), démontrant, s'il en était besoin, le talent et la richesse d'une véritable "école espagnole" que l'on découvre de plus en plus. Et on ne peut se dire qu'une chose en refermant ce premier volet de Shi : vite, la suite !