Trahie
Tome 1/2
Scénario : Sylvain Runberg d'après Karin Alvtegen
Dessins : Joan Urgell
Couleurs : Christophe
Dargaud
Rencontre à haut risque
Femme trompée, Eva se sent capable de tout pour se venger de son mari. Mais elle croise sur son chemin Jonas, un psychotique à l'enfance traumatisante, un prédateur bien plus dangereux qu'elle...
Après Stieg Larsson et le phénomène Millenium (Dupuis) et Camilla Läckberg et sa Princesse des Glaces (en attendant Le Prédicateur, Casterman),voici une oeuvre de Karin Alvtegen adaptée en BD. Moins connue (et médiatisée) que les précités, Karin Alvtegen, scénariste de séries télévisées, a entamé sa carrière d'écrivain en 1998 avant de recevoir, dès 2001, le prix Clé de Verre du meilleur roman policier nordique pour Recherchée, son deuxième roman. Depuis, ses livres, traduits dans 30 pays, ont été vendus à plus de 10 millions d'exemplaires.
Svek (Trahie, en suédois), bénéficie, comme Millenium, d'un scénario de Sylvain Runberg pour cette adaptation. L'auteur partage son temps entre la France et la Suède et connaît parfaitement le terrain où se déroule l'intrigue. Il l'avait également démontré en signant un épisode de l'éphémère série thématique Interpol (Dupuis) se déroulant lui aussi en Suède. Ainsi, par exemple, les dialogues de Trahie privilégient le tutoiement, le vouvoiement n'étant que très rarement utilisé dans ce pays.
Le style de Trahie est cependant fort différent de celui de Millenium. Dans ce premier volet, on est clairement confronté à un thriller psychologique. Runberg prend le temps de mettre en place son intrigue, en nous présentant parallèlement (mais on s'en rend compte très progressivement) les parcours d'Eva et Henrik, et de Jonas et Maria. L'auteur procède ensuite par flash-backs pour esquisser l'histoire de Jonas. Une construction qui déroute au début, mais dont on prend progressivement la mesure. Les couleurs de Christophe participent à la compréhension. Les scènes du passé sont traitées dans des tons d'ocre et de brun. Par petites touches, Sylvain Runberg fait monter la tension et parvient à transmettre au lecteur une sensation diffuse mais angoissante de malaise.
Joan Urgell délaisse le fantastique et l'horreur (La XIème plaie, Dead life, Soleil) pour mettre en images une histoire sombre mais ancrée dans le quotidien. Son dessin est certes perfectible (trop de ressemblance entre certains personnages) mais le jeune auteur espagnol s'en tire cependant avec les honneurs. En effet, l'intrigue offre très peu de moments d'action et le dessinateur parvient généralement à éviter l'écueil du statisme et de la répétitivité. Son travail alimente lui aussi cette lente montée de la tension et du malaise.
Et quand l'histoire semble prendre un tournant décisif, on a atteint la conclusion de ces 64 pages ! Reste donc à attendre le deuxième volet de Trahie avec curiosité et impatience, puisqu'il s'agit, une nouvelle fois, d'une adaptation réussie.