Mamada

Tome 3/3 : Abracadabrante errante

Scénario, dessins et couleurs : David Ratte

Paquet

Principe actif et sujet instable !

Désormais livrée à elle même, Mamada doit affronter seule la jungle parisienne. Et dans un environnement aussi insensé, notre guerrière himba va faire des rencontres de plus en plus étranges. De son côté, Sidonie, jeune suicidaire parisienne, va s’apercevoir qu’être ressuscitée n’est pas sans conséquences. Pendant ce temps en Namibie, himbas et coréens découvrent que le principe actif qui a contaminé Mamada présente des effets secondaires inquiétants. Il se pourrait même qu’ils la rendent encore plus irritable qu’avant, tandis qu’une menace mœbiusienne  plane sur la France.

Après une réédition revue du tome 2 publiée il y a quelques mois, David Ratte dévoile enfin les ultimes péripéties de l'odyssée de Mamada sous nos latitudes. Disons-le tout de suite, on en aurait encore bien repris un peu, tant l'auteur a donné vie à un personnage hors normes avec cette cheffe de village himba au catactère pour le moins explosif. La confrontation de la dame rouge avec notre "civilisation", ou plutôt notre société matérialiste vouée à la consommation dont David Ratte égratigne joyeusement les travers et pseudo-valeurs, nous vaut à nouveau son lot de moments hilarants, bien servis par des dialogues ciselés.

Un levier comique qui fonctionne décidément fort bien, tout comme les situations absurdes, souvent surréalistes dans lesquels les pouvoirs peu maîtrisés de l'héroïne plongent les protagonistes davantage conventionnels. Seule ombre au tableau de ce tome 3, cette espèce de blob multicolore apparu dans l'épisode précédent, décrit comme une menace moebusienne (!) apporte finalement fort peu à un récit déjà mené sur les chapeaux de roues. 

L'humour occupe évidemment le premier plan, l'improbable héroïne n'aurait sans doute pas voulu qu'il en soit autrement. Mais un peu de recul permet aussi d'ouvrir une porte à la réflexion au sujet de certains thèmes abordés, comme ce choc des cultures, ou encore la solitude de Sidonie, ado dépressive adoptée par l'irascible Himba.

David Ratte nous sert certains clichés, certes caricaturaux, mais ces mêmes clichés, il nous oblige à reconnaître que nous les alimentons, plus ou moins (in)consciemment au quotidien.

On en aurait bien repris un peu, oui, parce que Mamada échappe à tous les canons de l'héroïne de BD, ce qui la rend terriblement attachante. Et que si elle aborde son odyssée d'une manière bien différente de la nôtre, elle le fait aussi avec une forme de bon sens toute personnelle ! On relira donc avec beaucoup de plaisir cette trilogie trépidante. David Ratte, de son côté, se consacre désormais à un Noé complétaire à son fameux Voyage des pères. Pas sûr que les flots du déluge soient davantage apaisés...