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Les Passagers du vent - Tome 6.1 : La Petite Fille Bois-Caïman - Livre I, par François Bourgeon (12 bis)

Les Passagers du vent

Tome 6.1 : La Petite Fille Bois-Caïman - Livre I

Scénario, dessins et couleurs : François Bourgeon

12 bis

Les deux générations d’Isa

Vingt-cinq ans déjà… Vingt-cinq ans que les Passagers du vent s’en sont allés. Vingt-cinq ans que des milliers de lecteurs et de lectrices rêvaient sur le sourire de la belle Isa. Presque vingt-cinq ans sans nouvelles, et voilà que François Bourgeon replonge ses lecteurs dans cette série phare de la bande dessinée pour adultes. Cela en valait-il la peine ?

Après quelques relectures de la Fille sous la dunette et autres Ponton, la surprise est de taille : pas de trace du sourire d’Isa, aucune nouvelle de Hoel, la Petite Fille Bois-Caïman s’ouvre sur la Guerre de Sécession. Retour sur les Passagers du vent, puis réouverture de cette nouveauté. Où donc François Bourgeon s’engage-t-il ? Est-ce réellement une suite ? Un prétexte ? Une entourloupe ? Et l’on se dit que l’auteur réussit là une belle gageure : ne pas se contenter d’une simple suite. Ici, le dépaysement est total. Combien d’années séparent nos deux parties ? Que s’est-il donc passé entre-temps ? Oh, certes, François Bourgeon, avec son art consommé de la précision, saura bien récompenser ses lecteurs fidèles qui prendront le temps de voyager dans son imaginaire, mais pour l’heure, il s’agit d’apprécier cette vraie surprise, de se laisser guider dans les méandres des bayous…

Toujours aussi documenté, riche de références, précis, l’album dresse un état de la situation aux États-Unis dans cette période trouble de leur histoire, profitant de l’occasion, au hasard des discussions, pour dresser un état du monde et des forces en présence, l’air de rien. Ne reste donc qu’à suivre les pas d’une charmante jeune fille, Zabo, qui n’a pas plus froid aux yeux qu’Isa. Et une fois bien installé dans l’histoire présente, les lecteurs verront réapparaître cette dernière, sous un jour… étonnant. Petit pincement au cœur. Deux générations d’Isabeau.

Outre cette belle surprise, d’autres points attirent l’œil. Le dessin n’a peut-être plus ce côté alerte, léger, libre d’autrefois, il a changé, certes, mais il a mûri, tel un bon vin ayant, au fil des ans, perdu un peu d’allant mais ayant gagné dans le même une rondeur, une profondeur de bouche. Les décors sont magnifiques, l’auteur mettant un soin particulier au travail sur les couleurs, pour créer des ambiances fortes. Les dialogues sont très travaillés, et François Bourgeon manie le créole, l’anglais, quelques bouts d’espagnol tout autant que le français avec brio, alternant périodes de tension et humour léger. Mais aussi distillant ici et là des arguments pour et contre l’esclavage, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur.

Par ailleurs, l’auteur, tenu au classique 48-pages dans les cinq premiers volumes, et après avoir tâté des formats plus longs par la suite, prend ici le soin de dérouler son histoire sur une distance plus longue – 78 planches, du bonheur !

Petit cadeau final, et non des moindres, loin des longues attentes auxquelles ses lecteurs se sont habitués, ce nouveau cycle des Passagers du vent, sous forme de diptyque, sera complété dès janvier 2010. Seulement quatre mois d’attente. Pourquoi demander plus ?

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Mickael du Gouret
24/09/2009