Charlotte Impératrice

Tome 1 : La Princesse et l'Archiduc

Scénario : Fabien Nury
Dessins : Matthieu Bonhomme
Couleurs : Isabelle Merlet

Dargaud

Dans l'arène du pouvoir

Élevée par son père Léopold 1er, Charlotte de Belgique est destinée à faire un glorieux mariage. Pour la jeune femme, le choix s'arrête sur l'archiduc Maximilien d'Autriche, frère cadet de l'empereur François Joseph. Un mariage somptueux vient sceller leur union, qui, ne sera pourtant pas heureuse. Le jeune couple est dépassé par les rivalités dont ils sont le jeu, entre les terribles Habsbourg et le calculateur empereur Napoléon III. Et Maximilien se révèle un homme décevant, à tous points de vue...

Dans un premier temps, les deux auteurs se voyaient s'associer pour réaliser un western, et c'est pourtant vers l'histoire romancée de la princesse Charlotte de Belgique qu'ils se sont tournés. On peut certes y trouver un point commun avec leur idée initiale, via l'épopée mexicaine de Charlotte et Maximilien, amorcée en...dernière planche de ce tome 1. Mais c'est surtout le portrait très attachant d'une femme probablement en avance sur son temps, et en décalage avec son milieu et les contraintes qui y sont liées que nous proposent Fabien Nury et Matthieu Bonhomme.

Les intérêts des Habsbourg dictent le destin de Charlotte, alors que pourtant Maximilien se révèle faible et incapable...mais soumis au pouvoir de son frère l'Empereur François-Joseph. La courageuse Charlotte, elle, voudrait y avoir son mot à dire. Elle se retrouve étouffant dans ce carcan, progressivement broyée par des enjeux qui la dépassent.

Fabien Nury n'a plus à prouver son savoir-faire de scénariste, et si au départ on pouvait craindre de se retrouver face à une histoire plutôt statique ou encore à la Sissi (l'image d'Elisabeth d'Autriche est d'ailleurs  ici fort éloignée de celle imposée au cinéma par Romy Schneider), il nous livre un récit prenant, cruel et largement teinté de suspense. La Princesse et l'Archiduc s'octroie des libertés avec l'Histoire, mais Charlotte fait une belle héroïne de BD projetée dans l'arène du pouvoir et devant se battre pour y survivre.

Matthieu Bonhomme aborde un genre qu'il n'avait pas encore exploré, en poussant son trait élégant vers un style davantage réaliste. Après L'homme qui tua Lucky Luke, le dessinateur signe assurément une nouvelle réussite. En effet, il campe des personnages expressifs et excelle tant dans les scènes intimistes que dans les séquences à grand spectacle aux multiples "figurants" et aux amples décors. Les couleurs d'Isabelle Merlet soulignent les différentes ambiances.

La rentrée BD s'ouvre donc avec ce bel album, au sujet inattendu, et déjà avec l'impatience d'en découvrir la suite !