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Guerre froide et BD

La Guerre froide inspire les auteurs de bande dessinée. Plusieurs séries en cours proposent leur vision de l’affrontement entre les services secrets soviétiques et américains, et racontent les contours de cette guerre idéologique commencée en 1947 et qui n'a pris fin qu’en 1991 avec l’effondrement de l’URSS.

Dugain - Rodolphe - Chardez / Casterman
© Dugain - Rodolphe - Chardez / Casterman
La Malédiction d’Edgar (Casterman, collection Ligne rouge) est l’adaptation en BD du roman de Marc Dugain par lui-même, assisté depuis le tome 2 par Rodolphe, et mis en images de manière assez statique par Didier Chardez. La série, qui raconte la vie de John Edgar Hoover, directeur du FBI de 1924 à 1972, se penche notamment sur le contexte, les intrigues et les manipulations de l’ascension de John F. Kennedy. Elle montre le parti pris du premier policier du pays de privilégier la lutte contre le communisme à l’éradication de la mafia, et d’espionner la vie privée des hommes politiques. À noter par ailleurs, chez le même éditeur, la collection Rebelles, scénarisée par Maryse et Jean-François Charles, qui présente les biographies des personnalités des années 60, dont John F. Kennedy (Président), Che Guevara (Libertad !), Marilyn Monroe (Shooting Star) ou James Dean (Jimmy).

Stalner / Dargaud
© Stalner / Dargaud
La Liste 66 d’Éric Stalner (lire nos chroniques : T1, T2 et T3), chez Dargaud, plonge aux premières heures de la présidence de John F. Kennedy, en 1961. Il s’agit d’un thriller d’espionnage sous forme de road-movie le long de l'autoroute reliant Chicago à Los Angeles, la mythique Route 66. Le héros, Alex Poliac, ingénieur et espion dormant du KGB, est entraîné dans une course contre la montre, poursuivi par des agents du FBI et du KGB. Le récit haletant et palpitant de Stalner est l’occasion de dépeindre les États-Unis en cette période cruciale de la Guerre froide, d’analyser les luttes internes de pouvoir au sein des services secrets, et d’évaluer les ressorts des différents acteurs. La série est magnifiquement mise en images par un auteur qui réussit à renouveler le suspens et son style de dessin au fil des épisodes. La série devrait compter au moins six tomes.

Desberg - Labiano / Dargaud
© Desberg - Labiano / Dargaud
Black Op de Stephen Desberg (lire notre chronique), également chez Dargaud, couvre une période plus longue. Cette saga, construit comme une épique série d’espionnage, propose de nombreuses scènes de flash-back et une intrigue dense et complexe. Prévue dans un premier temps en six épisodes, Black Op raconte comment les services secrets américains ont fait émerger la mafia russe afin de provoquer l’effondrement du système soviétique de l’intérieur. Le dessin de Hugues Labiano, mis en couleurs par Jean-Jacques Chagnaud, rend parfaitement l’atmosphère noire et envoûtante de l’histoire de Floyd Whitman et Trent Jackwell, deux amis d’enfance membres de la CIA qui évoluent de manière opposée dans cette guerre dénuée de toute déontologie.

Brahy - Stoffel - Espinosa / Bamboo
© Brahy - Stoffel - Espinosa / Bamboo
En prolongation, Oukaze (Bamboo, collection Grand Angle) est également une occasion de confronter les services des deux puissances et de donner suite à cette renaissance de la mafia russe (lire notre chronique). La tétralogie écrite par Éric Stoffel et Luc Brahy évoque quatre semaines tendues en 2002. Sirweed Galver, haut cadre des services secrets américains, tente de mettre fin à une mission d’infiltration de la mafia russe pour s’emparer d’actifs pétroliers sibériens. Les événements s’accélèrent et prennent une tournure totalement imprévue, donnant au dessinateur Michel Espinosa l’occasion d’insuffler un rythme effréné.

Une extension pourrait être la série Les Nouveaux Tsars de Jean-Yves Delitte, parue chez Glénat (lire notre chronique). L’auteur s’intéresse, avec son style inimitable, aux exactions de la mafia russe en cette fin de 20e siècle. Mais là, la confrontation américano-russe a disparu. Reste que l’intrigue évoque toutes les formes de corruptions, de trafics et de méfaits, et apporte un regard accablant sur les conséquences de l’essor de la mafia en Russie. Sans doute la confrontation actuelle entre l’Occident et l’Islam va-t-elle progressivement alimenter les prochaines séries d’espionnage et politiques. Uchronie[s], une série née de l’imagination du scénariste Corbeyran (lire nos chroniques : New Byzance, New Harlem, New York), en est déjà une certaine approche… Nous vous en reparlerons prochainement.

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Manuel F. Picaud
14/07/2008 - source : auracan.com