S.0.S Bonheur - saison 2
Tome 2
Scénario : Stephen Desberg
Dessins et couleurs : Griffo
Aire Libre
Démocratie ?
Plus de trente ans après le cauchemar qu'Orwell nous promettait dans 1984, qu'est-il advenu de nos libertés individuelles ? Au profit de qui les gouvernements imposent-ils une norme censée organiser le bonheur de tous ? Griffo et Desberg confrontent leurs personnages à l'obligation de se conformer à ces lois prétendument prévues pour assurer le bien-être collectif, devenu une norme coercitive.
Donner une suite, 30 ans après, au premier cycle de S.O.S Bonheur créé par Jean Van hamme et Griffo demandait assurément une part d'audace. En effet, ce premier cycle a non seulement fait partie, à l'époque, des publications innovantes du tout jeune label Aire libre, mais a surtout durablement marqué ses lecteurs. La découverte du premier tome de cette saison 2, fin 2017, a démontré combien l'expérimenté Stephen Desberg a réussi ce pari scénaristique alors que le dessin de Griffo, qui a fortement évolué entretemps, reste parfaitement adapté à l'inquiétante thématique abordée par la série.
Couverture de l'édition luxe |
Cette trentaine d'années a aussi, hélas, rendu cette dernière plus aigüe encore. Alors que l'on pouvait aborder S.0.S. Bonheur comme une (très légère) anticipation, les problématiques évoquées dans cette saison 2 paraissent pratiquement actuelles. La société évolue rapidement, et ce nouvel album ressemble, plus encore que son prédécesseur, à un signal d'alarme.
Cette fois les auteurs nous livrent trois récits qui, s'ils semblent à première vue indépendants, se complètent habilement entre eux et rejoignent ceux du tome 1 dans leur conclusion. Le fameux Du pain et des jeux est toujours d'actualité dans une société paranoïaque où la délation semble être devenue un mode classique de fonctionnement. Pourtant la plupart des citoyens gardent l'illusion de vivre en démocratie. Le scénario s'attaque aux manigances du pouvoir comme à celles des médias, en particulier d'une télé réalité (?) prête à tout pour conserver son public.
L'histoire immerge progressivement le lecteur dans les rouages de ce système impitoyable. Heureusement, comme des grains de sable dans la machine, certains individus ont décidé de résister et de dénoncer. Le suspense se développe progressivement et on en viendrait prersque à espérer une happy end...
Desberg et Griffo complètent avec cet album un remarquable diptyque mais signent aussi une forme de constat glaçant et pessimiste dont il est impossible de sortir sans se poser certaines questions sur notre monde et notre mode de vie. Un glissement vers autre chose peut se produire peu à peu, discrètement mais sûrement... Peut-être a-t'il commencé... Bonne et heureuse année 2020 quand même !