Agatha Christie

Hercule Poirot - Le Crime de l'Orient-Express

Scénario : Benjamin Von Eckartsberg
Dessins et couleurs : Chaiko

Paquet

La machine à calculer

Hercule Poirot est à Istanbul, mais un télégramme lui demande de rentrer de toute urgence. Il doit prendre alors un billet pour l’Orient-Express en direction de Londres. Il reconnaît son ami M. Bouc, directeur de la ligne, qui va aussi en direction de Londres. Dans le train, M. Ratchett, un riche Américain, est tué de douze coups de couteau. Poirot, en collaboration avec M. Bouc et le docteur Constantine, interroge les passagers du train et découvre un grand nombre d’informations. Mais le mystère s’épaissit, tout comme la neige autour du train immobilisé au milieu de nulle part.

Alors que l'adaptation cinématographique signée Kenneth Branagh de l'un des plus célèbres romans d'Agatha Christie est sur les écrans, Benjamin Von Eckartsberg  et Chaiko Tsai  en signent la leur en BD. Attention, précisons qu'il ne s'agit en aucun cas de "la BD du film" mais bien de l'un des premiers albums d'une nouvelle collection dédiée à la reine du crime lancée par l'éditeur, succédant à celle des défuntes éditions Emmanuel Proust. Deux autres tomes, l'un consacré à une enquête de Miss Marple (Un Cadavre dans la Bibliothèque, d'Olivier Dauger et Dominique Ziegler) et l'autre aux Beresford (Mr Brown par Emilio Van Der Zuiden) sont parus simultanément.

On peut aisément imaginer que l'exercice était périlleux. Non seulement Le Crime de l'Orient-Express constitue un classique parmi l'oeuvre importante d'Agatha Christie, mais il s'agit d'un huis-clos aux nombreux personnages. L'enquête est...statique (on est loin d'un thriller survitaminé !) et il fallait parvenir à traduire le cheminement de la logique d'Hercule Poirot en planches et en cases. Benjamin Von Eckartsberg bénéficie d'une belle expérience avec son adaptation de la Chronique des Immortels, mais il ne s'agit cependant pas du même type de littérature. 

Malgré ces difficultés, le pari est plutôt réussi. Le scénario, rigoureusement construit, conserve l'essentiel de l'intrigue du roman. La personnalité des protagonistes est moins approfondie, mais le récit respecte le puzzle savamment défini par Agatha Christie. La séquence introductive, tragique, participe à la compréhension du mobile du crime. La part belle est faite aux personnages, et à l'atmosphère à la fois glaciale et étouffante du huis-clos. 

Le travail de Chaiko respecte cette option. Le dessinateur adopte un style différent, au trait encré plus prononcé, que celui de ses albums précédents. On en avait d'ailleurs eu un aperçu dans l'art book que Paquet lui a consacré. Les expressions de Poirot et de ses suspects se déclinent en de nombreux gros plans, alors que les décors sont souvent atténués. Peut-être pourra-t-on lui reprocher de faire fi du luxe du train mythique, mais l'enquête d'Hercule Poirot passe logiquement au premier plan. Une palette de couleurs froides renforce l'ambiance tendue.

Les très nombreux admirateurs de l'écrivaine vous le diront, les romans d'Agatha Christie traversent le temps. Une affirmation à laquelle  cette nouvelle adaptation d'un roman initialement publié voici près de 84 ans  donne envie d'adhérer !